Votif
par Saline
Dans la lande
Le soleil s’abaisse
Les elfes se préparent à la nuit
Et les ombres grandissantes
Arrosent d’une encre brune
La terre et le ciel
Aquarellant ce début d’automne
Par cette heure
Je lance
Mes âmes
Contre les pierres
De cette lande
Confinée exactement
Entre
Le Bois et le feutre
De ce bureau
Ou la lampe non encore allumée
M’offre hospitalité et repos
Dans le sombre du sombre
A mes chants noirs de cygne atrabilaire
Par la fenêtre
Une vue suspendit un temps
Le courant des mots
La respiration du chagrin
Dans ce coin de cour
Perdu
Comme un coin de bout de cour d’une clinique
Coins clos par le rouge de vieilles briques
Offrant leurs plaies ouvertes à l’abri des oiseaux
Murs en friches
Emmêlés des cheveux verts du lierre tenace en sa sauvagerie
Plus sourd et plus vieux que Dieu lui même
Une femme passa
Tourna autour d’un petit arbre
Petit, griffu mais nullement hostile
Oui, ce coin était tout à sa mission d’abandon
Des mains des jardiniers et des pas des patients
Exception
L’incohérence
Cohérente
Des pas en devidiations
Action
De dévider
Nos fils
Inconnus
Dans le parc du matin au soir
A l’instar des araignées
Ces derniers semblants plus portées par la gastronomie
Qu’à la métaphysique
Et
Sûr !
L’inconnu ne passa pas
Sans omettre
Des laisser quelques fils transparents
Dans les branches de l’arbuste
Aurais-je bien regardé ?
Je devinais plus que voyais
Bien d’autres fils ainsi
Pris dans l’écorce
récitant le mantra de leurs blessures
Je rêvais soudain d’arc en ciel
Pour qu’enfin l’arbre quittant sa transparence
Découvert en son mystère
Se prit d’offrir
Des branches votives
Aux foulards de chacun
Aux cœurs les plus myopes
Ainsi l’enfant remplaçant le disparu
Le chant berçant la peine
L’espoir caressant le désespoir
Après nos sanglots longs
Je rêvais d’arc en ciel
Pour que cet arbre votif
Se gonflant d’ambition
Dressant soudainement
Fièrement dans le vent filant
Ses foulards de prières
A l’instar
De ces amas de pierres
Ou temples
Ou buissons
Des lointains
Tibet
Népal
Bhoutan
Oui
Je sais
Qu’il est d’usage dans la Folie
De mêler ses écheveaux
A la mystique
Dans le présent conte
De tisser des rubans
Charger de confier aux vents
Nos mots, nos larmes, nos rires, nos prières
Dans mes moments
De chambre hospitalière
Je dors sous des volets clos
Demandant à l’envie
Demandant à la vie
De me coller
En parenthèse
J’occupe à plein temps
Ma couche et ma solitude
Ma transatlantique dépression
Jusqu’au sursaut
D’incendies internes
Les feux furieux de ma tête
Criants, réclamants
Batailles !
Le jeu de carte de la vie
Révolte
Mutinerie
De mes nerfs liés, alités
Qui se délient
Délire rebelle
Coup de sabots
Coup de griffes
Coup de dents
Que je ne sais retenir
Mon corps
Transformé en chimère
Pendant le temps de sa plongée coconnière
Melle
Poils et plumes
Serres et canines
Miel et venin
Je sens monter la fièvre mauvaise
De mes heures
D’ivresses
Soudain l’envie m’enleva
De tresser de laines et de soies
De perles de verre
Je suis pauvre en émeraude
Et puis
Le verre
Emplit d’antimoine ou de cuivre
Conte déjà tant de merveilles à l’œil
Qui traduit à l’oreille de languides légendes
Soudain
L’envie m’éleva
De dresser
Les voiles de mes désirs
Perles d’or et d’argent
Ou calligraphie noir des fils de plombs
De dresser
Ce lieu votif
Ostentatoire
Un brin aperçu
Dans le dédale
De nos échanges
Averses de réalités
Je suis partie
J’ai abandonné la chambre de repos
Mais
Dans le fond
Dans un coin perdu
Dans l’ombre de mon cerveau
Souffle le chant d’un arbre
Qui réclame sa parure de divin
Patiente
O mon arbre
Dit l’âme
J’y travaille
Ferme !
Poème posté le 11/10/17