Septembre à Ramble
.
Abandonnées aux glanes avec les feuilles des forêts
qui sont une façon pour les arbres
d’être seuls ensemble
de s’en plaindre en griffant les airs
les épaisses pailles par les moissonneurs
négligées çà et là sur les étendues d’éteules
accueillent les corbeaux venus
examiner ces fauchaisons des soleils d’août
.
Du bec les emplumés de houille
qui ne risquent pas de s’embraser
comptent les rayons desséchés
et disputent entre eux des présages
qu’on en peut tirer quand à la durée
de l’hiver selon qu’ils sont courts ou longs
Par sa fenêtre un être solitaire les observe
en buvant attiédi son café songeur
.
Il se souvient des charrues de fer qui rouillaient
aux angles des labours parce que les percherons
avaient cessé d’y revenir Des étables ombreuses
où se mêlaient eflluves de bouse et de foin
comme signes de l’antique robustesse de la vie
Des étagères où mûrissaient sur un lit d’orties
les fromages capables un beau jour de léviter
seuls sur la toile cirée où on les a posés
.
Mais aissi d’Irène avec son fichu noué à la pirate
sur sa tête Irène l’active et la paisible
qui surveillait au pressoir en quatre écartelé
les hommes excités en déchargeant
les demi-gâteaux de pommes compactés
marbrés ainsi que des puddings géants
sur lesquels poules et coqs montaient
pour gratter de la patte et picoter des pépins
.
Irène en robe grise voix joyeuse et sourire
Qui était l’âme des automnes à la ferme de Morel...