Le caïd du quartier
par Johnyvel
Le caïd du quartier rentre chez lui
Il entend sa mère qui pleure
En lisant des poèmes
Il écoute sa sœur
Ses je t'aime
Il pense qu'elles sont faibles et bêtes
Il pense qu'elles sont bien trop sensibles
Il pense que dans ses yeux vit le vrai monde
Il pense qu'il se moque de ces idiotes immondes
Il se moque
Et s'en va
La sœur du caïd vexée d'être moquée s'en va aussi
Au carrefour du marché l'aborde un beau garçon
Il l'arrête dans son trouble et lui lis un poème
Inventé "à la courbe de ta nuque blonde"
Elle écoute en buvant des nuages
Elle écoute se disant qu'elle est brune
Elle pense qu'il est naïf et beau ce garçon
Elle pense que son dessin n'est qu'enfantillage
Elle pense qu'il est perdu et lui donne un bonbon
Elle se moque
Et s'en va
Le garçon balancé ramasse son poème
Le papier est froissé et s'efface un "je t'aime"
Ecrit pour une femme ou une autre comme elle
Ecrit pour qu'on lui dise qu'ils sont beaux ses poèmes...
Il pense qu'elle est idiote et qu'elle passe à côté
Il pense qu'il vaut de l'or et qu'il est sous-coté
Il pense qu'il peut imaginer sans ressentir
Il pense qu'il peut superposer les vies
Il recommence encore et encore
Il remplit son sac à bonbons
Il dit qu'il s'en moque
Et s'en va
Ils ne voient tous que ce qu'ils voient
Ils se moquent de ce qu'ils ne voient pas
Ils se moquent toujours jusqu'à en souffrir
Et souffrent dans des larmes qui transpercent
Les draps noirs et aveugles de leurs ignorances
Ils pleurent et cherchent dans les paysages voisins
Des images qui brillent et des poèmes qui soulèvent
Ils mémorisent les jardins, les couleurs et les fleurs
Ils les peignent sur leurs murs salis par les douleurs
Alors,
Ils croient qu'ils aiment
Et dans leurs yeux se dessine
La croyance d'être aimés aussi
Ils pensent voir ce qu'ils ne voyaient pas
Ils voient un couloir infini qui les attire
Il se jettent dedans
Ils se brisent dans le miroir...
Le caïd du quartier rentre chez lui
Il entend sa mère qui pleure
En lisant des poèmes
Il écoute sa sœur
Ses je t'aime
Il pense qu'elles sont faibles et bêtes
Il pense qu'elle sont bien trop sensibles
Il pense que dans ses yeux vit le vrai monde
Il pense qu'il se moque de ces idiotes immondes
Contrairement à elles
Contrairement à eux
Il pense et ne regarde que par ses yeux
Les murs de ses douleurs sont maquillés
D'infinies couches superposées
Et pourtant,
Il ne vole pas les fleurs des autres
Ni les couleurs, ni les paysages
Non,
Il préfère s'en moquer
Et s'en aller.
Poème posté le 25/04/14