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Auteurs Messages

Salus
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Posté à 22h30 le 22 Apr 20


Je m'inscrit en faux contre ces arguments qui négligent la musique d'origine et le bon sens puisqu'il suffit de compter, si l'on a pas l'oreille rythmique, pour se rendre compte que, non, la métrique n'est pas plus respectée que la mélopée !

Je suis d'accord pour traduire, évidemment, mais à côté du texte original, et certainement pas à la place !
(En "Livre de Poche" la collection "Lettres Gothiques", par exemple, fait ça très bien)



Ce message a été édité - le 22-04-2020 à 22:39 par Salus


Laugierandre
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Messages : 1920


Posté à 12h21 le 23 Apr 20


Bonjour SALUS,

Je n'ai jamais dit qu'une transcription de texte remplaçait l'original, ni qu'une "actualisation" du langage était un acte qui prenait la place du texte source. J'ai toujours précisé qu'il s'agissait d'une "adaptation" à la langue d'aujourd'hui, et que cela facilitait la compréhension (à moins d'être un savant des langues anciennes), ce que nous ne sommes pas, je pense, ni l'un, ni l'autre.

À partir du moment où les "sons" expriment le sens, et où demeure l'harmonie expressive, il est bien agréable de pouvoir ainsi mesurer dans le langage d'aujourd'hui, la réflexion de l'auteur d'origine et de "comprendre" le pittoresque et la personnalité de l'écrivain de cette époque.

J'ai, moi aussi, une assez intéressante quantité d'ouvrages didactiques sur la poésie moyenâgeuse jusqu'à l'épanouissement de la Renaissance, avec analyse, traductions et explications de textes. Je peux t'assurer que les esthétiques poétiques sont respectées.

Je pense que nous nous éloignons un peu du sujet principal qui, dans ce topic, doit rester le cadre de la divulgation ainsi que des explications d'un "Dictionnaire" (et non de philosophie), avec tous les exemples qui y figurent.

Tout ce que contient ce "lexique" est extrait de mes différentes anthologies et Dictionnaires sur la poétique. Rien n'a été inventé, à titre personnel. De même que les "exemples" que je cite sont ceux qui sont représentés dans ces ouvrages.

Dans toutes les entreprises il y a toujours quelques divergences dans les points de vue, mais convenons que la vocation première de ce topic est avant tout d'inciter les aspirants poètes à assimiler les quelques règles essentielles sur lesquelles nous sommes en correspondance.

Toute ma sympathie, SALUS.

ANDRÉ

Salut Salut Salut


Salus
Membre
Messages : 6938


Posté à 20h09 le 23 Apr 20


Bien, bien, puisque tes nombreuses erreurs de citations, que j'ai déjà corrigées, ainsi que celles à venir, ni le simple décompte syllabique, le rythme du vers, ne semblent t'importer, je vais arrêter de t’embêter.

Brisons donc là-dessus, et bonne continuation !



Ce message a été édité - le 23-04-2020 à 20:24 par Salus


Laugierandre
Membre
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Posté à 21h26 le 23 Apr 20


Oui, je crois qu'il vaut mieux que tu arrêtes de jouer à l'érudit, SALUS. Tu es un infatué de ta personne, tu n'as pas d'argument à avancer à ce que je t'ai écris ci-dessus, et ton aigreur l'emporte sur ton "raisonnement". je crois que tu agaces les gens sur le forum.

Un peu d'auto-critique et un peu plus d'humilité ne te feraient pas de mal.

POINT FINAL !





Ce message a été édité - le 23-04-2020 à 21:30 par Laugierandre


Laugierandre
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Posté à 09h52 le 25 Apr 20


LE VERS DISSYLLABE

Comme son nom l'indique, le "dissyllabe" est un vers composé de deux syllabes. Sa brièveté, comme tous les vers très courts, lui donne un statut particulier, où il se présente, soit en isométrie, soit en hétérométrie.

En isométrie, le retour très fréquent de la rime et la virtuosité ainsi manifestée concentrent des effet expressifs très forts :

J'aimai
Fatmé,
Zulma
M'aima ;
Mais j'ai
Changé,
Vingt fois
De lois.

Joseph SERVIÈRES



En hétérométrie, le dissyllabe est d'un emploi plus fréquent, apportant un contrepoint rythmique au vers avec lequel il est employé :


Lune, quel esprit sombre
Promène au bout d'un fil,
Dans l'ombre,
Ta face et ton profil ?

Alfred de MUSSET


Une des plus belles utilisations du vers "dissyllabe" est ce passage extrait des "Orientales" de Victor HUGO dans son poème des "Djinns" :

Murs, ville,
Et port,
Asile
De mort,
Mer grise
Où brise
La brise,
Tout dort.

On doute
La nuit...
J'écoute :
Tout fuit,
Tout passe ;
L'espace
Efface
Le bruit.

___________________

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Laugierandre
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Posté à 12h58 le 26 Apr 20


RIME BATELÉE

Il s'agit d'un procédé de versification qui date du Moyen Âge. La "rime batelée" reprend la rime à l'intérieur du vers suivant ; elle se situe avant la césure. Le mot viendrait de "batelage", sonnerie de carillon.


Nostre eaige est brief ainsi comme des fleurs
Dont les couleurs reluisent peu d’espasse
Le temps est court et tout rempliz de pleurs
Et de douleurs qui tout voit et compasse.
Joye se passe, on s’esbat, on solasse*
Et entrelasse un peu de miel begnin
Avec l’amer du monde et le venin.
...

*On solasse : on se réjouit.

Jean LEMAIRE DE BELGES


Cette disposition de la rime batelée exige deux systèmes de quatre rimes chacun (ici en eur et en asse) dans chacune des 10 strophes que comprend ce poème dans ta totalité. L'auteur est l'un des plus habiles des Grand Rhétoriqueurs.

La Pléiade récusa par la suite ce genre d'acrobatie technique qui peut privilégier la versification au dépens de la poésie - chez les poètes médiocres. Ce n'est pas le cas lorsqu'elle est bien utilisée par de vrais poètes, ou lorsqu'elle est en situation.


Ci n'entrez pas, hypocrites, bigots,
Vieux matagos, souffreteux bien enflés,
Tortcous, badauds plus que n'étaient les Goths
Ni Ostrogoths, précurseurs des Magots,
Haires, cagots, cafards empantouflés.
Gueux mitouflés, frappards écorniflés,
Bafoués, enflés, fagoteurs de tabus*;
Tirez ailleurs pour vendre vos abus.

*Fagoteurs de tabus : ceux qui préparent des bûchers pour les hérétiques.

RABELAIS


Si la rime batelée disparut en tant que système codifié, les poètes ont toujours su utiliser des correspondances sonores d'un vers à l'autre.

Quelques extraits et exemples fameux :


J'avais un jour un valet de Gascogne
Gourmand, ivrogne et assuré menteur" (Clément MAROT)
__________________

Nymphes des bois, pour son nom sublimer
Et estimer, sur la mer sont allées.
__________________


« Je rêve en mon dortoir des lumières sereines,
Une éclatante reine en un pompeux manoir
Mais dans le profond noir s’envolent des phalènes,
Mille flocons de laine en un sombre miroir »

Marcel SCHWOB


Sans avoir le strict respect des règles des Rhétoriqueurs, de nombreux poètes ont utilisé cette "répétition" de la rime à l'intérieur d'un vers, parfois à la césure, notamment les poètes symbolistes, avec d'autres systèmes d'assonances ou d'allitérations créant une harmonie subtile lorsqu'elle est consommée avec modération.

Habitués aux jeux poétiques et aux procédés de style quelques uns de nos poètes "maison", après la "dilatation", "la condensation", les "fins de vers" et les "vers en écho", se laisseront-ils tenter par ce nouveau chant des sirènes ?...
___________________

À SUIVRE...




Ce message a été édité - le 26-04-2020 à 12:59 par Laugierandre



Ce message a été édité - le 27-04-2020 à 11:28 par Laugierandre


Laugierandre
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Posté à 11h43 le 27 Apr 20


VERS TÉTRAMÈTRE

Ce terme vient des versifications grecque et latine où il désignait un vers de quatre mesures (8 pieds), comme l'indique le préfixe "tétra" (quatre).

Dans notre versification, c'est un alexandrin composé de quatre mesures de trois syllabes chacune :


Cette nuit,/ des oiseaux/ ont chanté/ dans mon cœur.../.

Renée VIVIEN


Autres exemples :


Il vous naît/ un poisson/ qui se met/ à tourner/.

Jules SUPERVIELLE


Si j'ai froid/ si j'ai nuit/ si j'ai pein(e)/ à survivre/.

Claude ROY


Les soupirs/ de la Saint(e)/ et les cris/ de la Fée/.

Gérard de NERVAL


Comme on peut le constater, malgré que ces vers soient découpés en quatre mesure de :

3/3//3/3/

il y a, comme dans l'alexandrin classique, une césure franche après la 6ème syllabe. Il ne faut surtout pas oublier ce détail qui est très important.

Voilà sans doute un procédé qui plaira à nos ami(e)s en recherche de jeux de sonorités, de variations du rythme et de figures de style.
____________________


LA GLOSE

En grec "glôssa" qui signifie "langue". Ou encore "glosa" qui veut dire : "mot qui a besoin d'une explication."

En poétique, la glose est un poème qui "parodie" une poésie célèbre. Aujourd'hui, elle a le sens général d'une annotation, d'un commentaire, et, par la suite de l'abus qu'en ont fait de pseudo-savants jusqu'à étouffer le texte original sous leurs gloses, il a pris une connotation péjorative. "Tu gloses, tu gloses, c'est tout ce que tu sais faire", aurait pu dire le perroquet de Raymond QUENEAU;

Le mot est apparu en France dès le XIIème siècle. Il a donné son nom à un genre poétique à vrai dire assez peu répandu, mais parfaitement défini. La "glose" est une variété de la "parodie". Elle est une poésie dans laquelle un autre poème connu et même célèbre est paraphrasé ou parodié en strophes de quatre vers, de telle façon que, du premier au dernier vers, chacun des vers du poème parodié reparaît à son tourt dans la "glose", comme dernier vers de chacune des strophes de la "glose".

Cinq strophes, ci-dessous, suffiront, bien plus qu'un volumineux développement, à suivre le mécanisme de la "glose".

Prenons l'exemple d'un quatrain d'Isaac de BENSERADE intitulé "JOB". Vous remarquerez que Jean-François de SARAZIN, à construit son propre poème en utilisant chaque vers de ce quatrain à la fin de chacun des siens.

Tel est le principe de la "glose". Un jeu passionnant qui incitera peut-être quelques uns d'entre vous à se frotter à l'exercice et à relever le défi sur une poésie de son choix.

JOB

Job, de mille tourments atteint,
Vous rendra sa douleur connue
Et raisonnablement il craint
Que vous n’en soyez point émue.
___________________

GLOSE SUR LE SONNET DE BENSERADE par Jean-François SARAZIN

Monsieur Esprit, de l'Oratoire,
Vous agissez en homme saint,
De couronner avecques gloire
Job de mille tourments atteint.

L'ombre de Voiture en fait bruit,
En s'étant enfin résolue
De vous aller voir cette nuit,
Vous rendra sa douleur connue.

C'est une assez fâcheuse vue,
La nuit qu'une Ombre qui se plaint.
Vôtre esprit craint cette venue,
Et raisonnablement il craint.

Pour l'apaiser, d'un ton fort doux
Dites, j’ai fait une bévue,
Et je vous conjure à genoux
Que vous n'en soyez point émue.
____________________

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Laugierandre
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Posté à 11h04 le 29 Apr 20


LE ZUTISME

Nom masculin. Fondé en 1871 par Charles CROS et quelques amis, le groupe des poètes "zutistes", dits aussi "poètes zutiques" (ou encore : le "cercle du zutisme") succéda aux dîners des "Vilains Bonshommes" qui avaient réuni, de 1869 à la guerre de 1870, quelques jeunes Parnassiens turbulents.

Après la guerre, les "Zutistes" regroupaient une douzaine des poètes les plus remuants, et notamment CABANER, CARJAT, les frères CROS, FORAIN, Germain NOUVEAU, Camille PELLETAN, Raoul PONCHON, Jean RICHEPIN, Arthur RIMBAUD, Léon VALADE, VERLAINE, etc... Les réunions avaient lieu à "l'Hôtel des Étrangers" (au coin de la rue Racine et de la rue de l'École-de-Médecine, à Paris).

Ces jeunes gens s'amusèrent à écrire et à dessiner dans un grand carnet intitulé "Album zutique". On y trouve vingt-quatre pièces de RIMBAUD, vingt-quatre de VALADE, douze de VERLAINE, une petite dizaine de Germain NOUVEAU, etc... Beaucoup d'entre elles ne respectent guère la décence, comme le sonnet consacré à l'anus par VERLAINE et RIMBAUD.

De nombreux poèmes sont des "pastiches" parodiques d'œuvres de poètes alors célèbres, comme Louis RASTIBONNE, Léon DIERX, Armand SYLVESTRE, etc. Le plus parodié dans cet "Album zutique" est François COPPÉE dont les dizains sont imités et ridiculisés. Ces poèmes sont en général signés (faussement) du nom du pastiché, avec des initiales qui permettent de connaître le véritable auteur. C'est dans cet album que figure le délicieux "Pantoum négligé" de Paul VERLAINE , attribué sans vergogne à Alphonse DAUDET.

Souvenir d’une enfance austèrement bébête
— Ô les commencements chétifs d’un grand poète : —
J’ai dans ma chambre deux images d’Épinal
Naïves que commente un texte marginal
Où la simplicité se mèle à l’énergie :
C’est Napoléon III terrassant l’Anarchie
Et c’est le plus clément des lions florentins.
— Soyez bénis, doux bois affreux, d’où je retins
Pour braver les dangers de cette vie amère,
L’amour de mon Pays et l’amour de ma Mère.

François COPPÉE (en réalité : Paul VERLAINE)

_____________________

SONNET

DORS-TU CONTENT, VOLTAIRE ?

Si nous étions morts quand nous étions mômes
Dites-moi, serions-nous plus malheureux ?
À quoi donc nous sert de devenir hommes
Si c’est pour souffrir des maux plus nombreux !

Les petits plaisirs laissent désireux,
Tous nos petits sous ne sont pas des sommes
Et c’est pour un X encor plus affreux
Qu’il nous faut quitter le monde où nous sommes.

Et nous avons beau nous mettre à genoux
Et beau t’implorer, tu ne tends vers nous
Jamais tes deux mains, Sainte Providence !

— C’est pourquoi, crois-moi, pauvre genre humain,
Chante et ris, sans trop croire au lendemain ;
Va, saute, Arlequin ; danse, Pierrot, danse !


Alfred de MUSSET (en réalité : Germain NOUVEAU)

____________________


L'ANTONOMASE

"L'antonomase" (féminin, du grec "anti" contre, et "onoma" nom, est un cas particulier de la synecdoque et de la métonymie qui consiste à employer un nom propre à la place d'un nom commun. Comme, par exemple, un "Harpagon" pour un "avare".

Ainsi, dans "Connaissances de l'Est", CLAUDEL écrit :

"Je vois debout dans le Banyan un Hercule végétal, immobile dans le monument de son labeur avec majesté."

Il y a une "antonomase" (un Hercule = un homme fort, musculeux), doublée d'une métaphore par personnification de l'arbre.

Cette figure de style a l'intérêt de mieux spécifier l'appellation commune et banale.

Dans cette optique, un "céladon" est un amoureux transi. Une "messaline" est une femme qui s'adonne à la débauche.

Les poètes et les écrivains sont les créateurs d'un grand nombre d'antonomases. Un "tartuffe" désigne un personnage hypocrite, tout comme "La ville éternelle" signifie "Rome". Un "mécène" est "un généreux donateur". Une "égérie" est associée à une "inspiratrice", à une "muse". Un "Don Juan" : un "séducteur".
____________________


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Laugierandre
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Posté à 12h36 le 30 Apr 20


LE CHAPELET

On appelle "Chapelet" en poésie, un poème qui peut se lire dans les deux sens, en recommençant par le dernier vers et en remontant jusqu'au premier.

Dans cet ordre inversé, le poème doit conserver tout son sens. Chaque vers devient ainsi le "grain d'un chapelet" qu'on peut faire défiler dans un sens ou dans l'autre.

Voici un exemple de "chapelet" :

À la Mi-Carême,
On danse, l'on danse.
La ronde que j'aime,
Je la recommence.
Changez la cadence !
Les pas sont les mêmes,
C'est la récompense
À la Mi-Carême !

___________________

À la Mi-Carême,
c'est la récompense :
Les pas sont les mêmes,
Changez la cadence !
Je la recommence,
La ronde que j'aime.
On danse, l'on danse,
À la Mi-Carême.
____________________


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Ce message a été édité - le 30-04-2020 à 12:37 par Laugierandre


Laugierandre
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Posté à 10h13 le 03 May 20


LE RUBAÏ (ou ROBAÏ)

Poème sous forme d'un quatrain dans le style du poète persan Omar KHAYYÂM (XIIe siècle) dont on connaît en France les traductions de ses "rubayyat" (le mot signifie simplement "quatrain".On écrit parfois aussi "rubaiyat", ou "robaiyat".

C'est un genre poétique enrichi des prestiges de l'exotisme ; il a inspiré des poètes sans qu'ils en aient connu les règles précises. Les traductions ont d'abord été faites du persan en anglais, puis de l'anglais en français. Elles sont aujourd'hui effectuées directement en français à partir des originaux.

Le "rubaï" exprime un état d'âme très particulier, une espèce de sagesse mélancolique un peu désabusée. Son contenu est extrêmement variable. On peut y parler d'amour ou de philosophie, y célébrer le vin, y railler des ennemis, y taquiner un ami, y chanter la nature, y exprimer une extase mystique, s'y plaindre des conditions de vie, etc. Le "robaï" se prête à tous les thèmes.

En voici un exemple d'Omar KHHAYYÂM :

Comme un duvet sur la lèvre
d'un célèbre jouvenceau,
Vois la verdure qui lève
aux tendres bords du ruisseau.
Que ton pas y soit léger :
Elle est née de la poussière
D'un frais visage naguère
pareil au coquelicot.

____________________

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Ce message a été édité - le 03-05-2020 à 10:15 par Laugierandre


Laugierandre
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Posté à 12h23 le 08 May 20


LA RIME RENFORCÉE

Ce nom a été imaginé par Louis QUICHERAT, un latiniste français, notamment connu pour être l’auteur de deux dictionnaires bilingues latin-français et français-latin, dans son "Traité de versification" (1850), à un système où les "hémistiches" riment entre eux et avec la rime finale.

Un bel exemple de Léon JAMET, intitulé :

À MAROT

Mais voirement, ami Clément,
Tout clairement dis-moi comment
Tant et pourquoi tu te tiens coi
D'écrire à moi, qui suis à toi ?
T'ai-je laissé par le passé ?
T'ai-je offensé ou courroucé ?
Ai-je à ton dit et interdit
En fait ou dit rien contredit ?
Ai-je à ton nom donné renom
Autre que bon ? Tu sais que non :
Ni ne voudrois, ou ne saurois
Tant sont tes droits justes et droits.

On constate que ces octosyllabes à rimes plates (toutes masculines) pourraient être disposés autrement : par quatrains de vers de quatre syllabes. Comme dans la "rime batelée" on introduit ici un autre découpage possible du mètre, mais de façon plus rigide et monotone que celui de la "rime batelée, encore que le poème sautillant de Léon JAMET ne manque pas d'un certain charme un peu mécanique, celui des boîtes à musique.
__________________

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Laugierandre
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Posté à 18h45 le 16 May 20


LA PARAPHONIE

D'un mot grec signifiant "accord à côté" la paraphonie évoque la rencontre malheureuse de diverses sonorités faisant naître un ou plusieurs mots différents, inattendus.

En poésie, l'exemple le plus célèbre et le plus fréquemment cité est un vers de CORNEILLE :

...
Je suis Romaine hélas, puisque mon époux l'est.
l'hymen me fait de Rome embrasser l'intérêt
.
...

On entend, à la lecture de ce vers "Ménélas" et "poulet".

Un autre vers du même auteur faisait la joie des lycéens, du temps qu'ils étudiaient les classiques :

...
Vous me connaissez mal ; la même ardeur me brûle
Et le désir s'accroît quand l'effet se recule.


Sous l'ardeur qui les brûle, ces "fesses" qui reculent ont un certain charme évocateur qui n'avait pas dû échapper à un auteur dont la virtuosité de l'anagramme d'Horace laisse entrevoir une obscure malice qui tremble sous le voile.

La paraphonie est de tous les temps. On raconte qu'un jeune poète lisant à Alfred de MUSSET une ode en son honneur fut interrompu dès le premier vers : "Ô toi dont le nom brille..."

MUSSET lui dit : "Pardon, jeune homme, je ne vous l'ai pas montré..."

La paraphonie, d'ailleurs, est une variété du "calembour" et touche souvent à la "cacophonie". L'une des caractéristiques des vers holorimes est forcément d'utiliser sans cesse la paraphonie.
__________________

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Ce message a été édité - le 16-05-2020 à 18:48 par Laugierandre


Laugierandre
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Posté à 12h25 le 20 May 20



LE RENTREMENT

Le "rentrement" est le "refrain" du "rondeau", lorsque, tiré du début du premier vers, il s'ajoute, isolé, à la fin des deux autres strophes.

Dans ce "rondeau" de Lemaire de BELGES, le "rentrement" consiste dans un seul mot, l'adjectif grande :

Grande concorde et petite avarice,
Cœurs abandonnés à louable exercice,
Audace en guerre et en paix équité
Haussèrent Rome en telle autorité
Que tout le monde était pour son service.

Là fut assis le trône de justice
Faisant si bien envers tous son office
Qu'on n'estimait autre félicité
Grande.

Mais quand vertu céda son lieu à vice,
Que ambition et pécune nourrice
De tous maux eut crédit en la cité,
En peu de jours sa ruine a été
Et le rabat de son los et police,
Grande.
__________________

À SUIVRE...





[i]Ce message a été édité - le 20-05-2020 à 12:27 par Laugierandre


Laugierandre
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Posté à 19h41 le 07 Jun 20


LA PARANOMASE

Ce composé savant où se retrouvent "para" (à côté de) et "nomen" (le nom), désigne des mots voisins par le son (mais pas si proches que des homonymes).

En poésie, la paranomase est parente de la formule "un mot pour un autre".

Les puristes tolèreront dans l'exercice une paranomase qui ne change pas grand chose pourvu que le son, le sens, la métrique soient respectés.

Exemple :

Le meunier, son fils et l'âne

J'ai lu dans quelque endroit qu'un meunier et son fils,
L'un vieillard, l'autre enfant, non pas des plus petits
Mais garçon de quinze ans, si j'ai bonne mémoire,
Allaient vendre leur âne, un certain jour de foire.
...

Jean de La Fontaine.

On peut admettre : "Mais garçon de seize ans...", compte tenu de l'âge du récitant, et de l'intérêt des filles pour le garçon. Mais pas de "quatorze ans" qui change le mètre.

On n'acceptera pas non plus "allaient vendre leur âme. Cette paranomase change trop le sens de l'anecdote.

On refusera de même : "un certain jour de gloire".

Il faut savoir imposer les limites à la paranomase en poésie. Sinon, la contagion s'étendrait.
_________________

FIN.










Ce message a été édité - le 09-06-2020 à 12:10 par Laugierandre


Pierre
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Posté à 16h08 le 10 Jun 20

Citation de Laugieandre :
Il faut savoir imposer les limites à la paranomase en poésie. Sinon, la contagion s'étendrait.


Et par les temps qui courent la contagion est un sujet sérieux... cool



Ce message a été édité - le 10-06-2020 à 16:08 par Pierre

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