|
Posté à 14h11 le 18 Apr 21
On en parlait dernièrement avec Ann en visio, au sujet du haiku, made in Japan, fort prisé chez nous.
Ann m’a mise au défi d’adapter ce poème aussi bref qu’harmonieux - à l’image du japonais-
en allemand aussi tortueux que guttural.
Top-là !
Voici le résultat en trois versions moki, kigo et senryū, en respectant le rythme 5/7/5
Moki (animaux)
Laut pfeift die Amsel
Und gurgelt die Ringtaube
Die Schwalbe kommt bald
Le merle siffle fort
Et la tourterelle roucoule
L’hirondelle arrive bientôt
+++
Teich mit Seerose
Des Frosches liebsten Sitzplatz
Wenn die Liebe juckt
Etang avec nénuphar
Le poste préféré de la grenouille
Quand l’amour démange
*****************
Kigo (Saisons)
Kirschblüten fallen
Weiße Pracht liegt am Boden
Des Frühlingslaune
Fleurs de cerisier tombent
Blanche élégance au sol
Humeur de printemps
+++
Schweiß nässt die Stirne
Doch fließen keine Tränen
Nur Sommers Freuden
La sueur mouille les fronts
Mais aucune larme ne coule
Seules les joies de l’été
*************
Senryū (humain, si possible comique)
Mit der Ausrüstung
Schießt der Jäger nur Bilder
Er mag kein Wild mehr
Avec son équipement
Le chasseur ne tire que des photos
Il n’aime plus le gibier
++++
Kluger Pilzsammler
Verrät seine Fundorte
Nur wenn nicht essbar
Malin cueilleur de champignons
Ne révèle ses lieux de trouvailles
Que si non-comestibles
Ecrits directement en allemand, cela sonnait pas trop mal à l’oreille
Ensuite seulement traduction en français – Cela prend une allure bizarre…
J’imagine que nos haikus français sont tout aussi étranges, voire cacophoniques, à l’oreille nipponne, une fois traduits en japonais.
|
Ann
Modérateur
Messages : 3483
|
Posté à 17h13 le 18 Apr 21
A mon sens, ça sonne mieux en allemand qu'en français à cause de la traduction
Je ne suis pas certaine que l'haiku corresponde à nos esprits européen.
Défi supplémentaire, tente de nous concocter une version française en haiku
|
Ann
Modérateur
Messages : 3483
|
Posté à 17h41 le 18 Apr 21
Comme pour le délire, faut pas me pousser longtemps, j'ai tenté l'exercice en anglais et en russe. J'ai fait en français. Bon ce n'est pas terrible ou du moins sans intérêt.
J'ai poussé le vice jusqu'à demander à une amie qui vit au Japon avec son nippon de mari de me traduire tout ça !
Merle siffle fort
La tourterelle roucoule
Bientôt l’hirondelle
The turtledove coos
The blackbird whistles loudly
The swallow’s here soon
Горлица воркнет
Черный дрозд громко свистит
Скоро ласточка
(Gorlitsa vorkniet
Tchierni drozd gromko svistit
Skoro lastochka)
Pour les allumés du cerveau qui auraient d'autres propositions....
|
|
Posté à 18h31 le 18 Apr 21
Bravo, une belle transcription.
Nous savons cependant que sans les idéogrammes de la graphie japonaise, une réalité doit nous échapper cette "densité fulgurante" ainsi que le "flou sémantique "qui est différent pour un japonais, par rapport à notre langue.
Mais le traducteur comme le rappelle Ungaretti fait "oeuvre originale de poésie".
Souffle pour souffle.*
*source: le sublime au ras de l'expérience, Haiku, NRF,Poésie, Gallimard.
Ce message a été édité - le 18-04-2021 à 18:32 par Ottomar
Ce message a été édité - le 19-04-2021 à 07:38 par Ottomar
|
Ann
Modérateur
Messages : 3483
|
Posté à 23h05 le 18 Apr 21
tout frais tout chaud livré du jour, la version nippone
クロウタドリが強く鳴いている、
キジバトがクークーで鳴く
ツバメがもうすぐ来る。
kurōtadori ga tsuyoku naiteiru
Kijibato ga kūkū de naku
Tsubame ga mōsugu Kuru
Ce n'est pas pour dire mais c'est vachement long pour faire court !
|
|
Posté à 08h23 le 19 Apr 21
Chère Ann, tu dis n'être pas certaine que le Haïku correspond à notre esprit européen. En fait je ne voulais pas dire autre chose. Je suis entièrement d'accord avec toi.
De mémoire, je me souviens de la tentative de Roland Barthes, dans l'Empire des signes, d'analyser le sens du haïku japonais pour un français et faire que celui-ci puisse accéder à une sagesse universelle. Mais le haïku japonais est lié, associé à une culture elle même influencée par le bouddhisme zen avec une part importante de mystique. Je cite de mémoire
"le mot n'est pas la chose et la chose n'est pas le mot et va bien au delà." D'ailleurs c'est sans doute valable pour toutes poésies et à plus forte raison pour toutes traductions de poésie.
Cela n'empêche pas la beauté des traductions voire le haïku en toutes langues que nous apprécions.Souffle pour souffle...
Bon comme dit "l'autre" on va pas en faire une thèse...quoique...
Ce message a été édité - le 19-04-2021 à 08:26 par Ottomar
|
Ann
Modérateur
Messages : 3483
|
Posté à 08h41 le 19 Apr 21
C'est un exercice qui est de fait imparfait, il permet de tendre à décrire une situation le plus synthétiquement possible alors l'écueil poétique est quelquefois l'emphase.
Notre difficulté n'est pas tant la brièveté, c'est d'occulter les sentiments. Décrire sans y mettre une part de l'humain à part le bottin, je ne vois pas
|
|
Posté à 11h08 le 20 Apr 21
Le Haïku ? Peut-être l'illustration ultime de ce que Fernando PESSOA préconisait :
Lien internet
|
|
Posté à 18h24 le 22 Apr 21
J'ai tout vu et tout lu, même ce qui a été posté sur ce thème ailleurs dans le site qu'ici, comme des échos lointains qui se seraient perdus en chemin...
D'accord avec Ann et Ottomar :
[i]" Je ne suis pas certaine que l'haiku corresponde à nos esprits européen"
D’où mon peu d’affinité pour ce genre de poésie importée, un peu comme une plante exotique luxuriante en sylve équatoriale mais rachitique sous nos cieux !
Amicalement à vous
|