Bonne fête


Prostrée dans une cale d'un bateau en direction du sud de la France, La peine et la peur chevillées au corps, elle quitte son pays.
Elle s'en remet à dieu, à l'espoir, à l'enfance car à dix ans vers l'horizon tout est encore promis.
J'aurais voulu connaître cette fille qui fébrile, se morfond en silence, ne sait pas de quoi sera fait son avenir. Les nausées, le mal de mer la laminent en cadence de la houle assassine qui lui déchire sa vie. Son ancienne vie.
J'aurais aimé être un de ces fantômes des contes de Charles Dickens qui traversent les temps, pour prendre la main de cette enfant amère qui ne sait pas encore qu'elle sera une maman. J'aurais aimé lui dire, ne pleure pas petite, un chapitre se ferme mais là-bas désormais c'est la vie qui t'attend.
Il aurait été juste que je lui rende ce courage, cette force de vie fragile à cet instant.
Elle n'a pas eu besoin de moi. Elle s'est redressée, s'est construite et a montré au monde qu'elle était faite du même bois que sa mère.
Mais si je pense aujourd'hui à cette petite fille effrayée dans la cale de ce bateau, c'est pour ne pas oublier, pour bien imaginer ses souffrances, ses douleurs, son parcours, ses moments de faiblesse qui l'ont rendue plus forte pour construire son foyer avec tout son amour.
Depuis que je suis né c'est elle qui me porte, avant que je sois né c'est elle qui me portait. J'aimerais juste pour une fois que s'inversent les sorts, que je panse une plaie dans le fond de son âme. Agir est toujours mieux que galvauder des phrases mais ce saut dans le temps n'est pas encore possible. Aussi je me contente d'être fier de cette dame, de récolter les fruits qu'elle a laissé mûrir. Au travers des épreuves qu'elle a su m'éviter, je ne puis que sourire et lui dire combien c'était doux et combien je vais encore l'aimer




Ecrit par Zitoun
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