Béguin

Béguin était beau et robuste.
Notre bonheur ce fier arbuste
Qui fleurissait au nez des gens,
Rendait jaloux les indigents.
Ses branches fines, tentaculaires
S'entremêlaient, formant ainsi,
Une impénétrable barrière
D'épines de fleurs et de fruits.
Il protégeait son propre cœur
Devant les oiseaux de malheur
Venus mettre à sec, décharner
De leurs becs, ces pics acharnés.
Mais pour les poètes, les honnêtes,
Ceux qui savent apprécier l'amour,
Nous organisions des cueillettes.
On nous visitait tous les jours.
Mon petit arbre dans mon jardin,
C'est vrai que j'en parlais si bien.
Nous l'avions appelé Béguin
Le bonheur jusqu'à un matin...
A trop vouloir le présenter
A trop l'exposer par tous temps,
Nous n'avions pas su remarquer
Tous ces feuillages jaunissants.
Ah certes, on l'avait contemplé.
Mais bien trop peu entretenu.
Des fruits pourris faisaient plier
Des branches grisâtres et menues.
Désormais dépourvu d'écran,
Les oiseaux de mauvaise augure
Sifflaient, chantaient en massacrant
Ce qui lui restait de plus pur.
Sans notre courageux Béguin,
Le jardin n'était que tristesse.
Deux ou trois fleurs tentaient en vain,
De sauver un peu de tendresse.
Pour ne pas affronter l'image
De l'échec, l'arbre squelettique,
tandis que je tournai la page,
Sur elle poussa bec, puis pic...




Ecrit par Zitoun
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