Retrouvailles

Chaque fois que je la revois, ma Jeanne d'Arc de Cupidon,
ce ne sont que piaffes de chevaliers de tournois à la rose
se présentant, prêts pour la Grande Aventure, l'un à l'autre,
plein d'éclairs dans les yeux comme fulgurations d'atmosphère,
Que libérations aux sonneries intérieures des trompettes festives
déclarant, solennellement, joutes et réjouissances ouvertes,
Que galops débridés, chevauchées fantastiques, numéros inouïs
de montures prenant, caparaçonnées dans leur candide nudité,
tour à tour, le dessus,
Qu'assauts indescriptibles en tous sens et en toutes positions
dans - ô panache ! - des débauches de manches et de belles
à n'en plus finir,
Que, pêle-mêle, évolutions, progressions, manœuvres, avancées,
retraits, replis, décrochages, reculs, reculades, dérobades,
reprises en main, retours en force, retournements de situations,
Qu'empoignes de lutteurs de foire, que poussées, que pressions,
Que charges épiques, que - hors des pieds et des poings - becs et [ongles
sans retenue, à corps perdu, dans des pancraces acharnés,
Qu'engluements dans des rets de rétiaire, que malices et trucs,
mouvances en tous terrains, percées sur tous les fronts, [enfoncements,
Que coups de reins, coups de lance, tous dignes coups
et contrecoups, déluges de traits de bataille d'Azincourt,
enflammés par les ors du soleil,
Qu'investissements, possessions, jaillissements, soubresauts,
ruissellements de sueurs de bains turcs
dans des frémissements de chair voulant toujours plus en découdre,
des souffles de proximité haletants, des soupirs, des plaintes [étouffées,
des râles, des gémissements, des exclamations, des délires,
des exhortations à la grâce, des cris de bêtes meurtries
que ne peuvent, en ces corps à corps singuliers, réprimer
pincements et morsures de lèvres,
Jusqu'au terme des échanges où chacun puise
dans ses dernières forces, ses dernières réserves :
baroud d'honneur final avant la suprême sublimation,
le grand silence, la paix des âmes et des cœurs,
où il n'y aura, fors l'Amour triomphant, ni vaincu ni vainqueur.


Le 25 juin 1996.




Ecrit par Stapula
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