Requiem des couleurs

Couleurs, couleurs, couleurs ! Dansez sur mes paupières
Quand je vais sur le monde en priant des fantômes.
Quand je sens sur ma peau les gouttes meurtrières
Qui passent dans mes mains en me trouant les paumes.

Portez-moi ; ô couleurs ! Je n’ai toujours que vous
Sur la poussière bleue. A mes yeux éveillés
Vous ne changez jamais. Ils tuent les marabouts
Qui massacrent partout les têtes enflammées.

Je n’avais rien compris ! Avant le dernier couac
Il me faut vous étreindre et vous dire merci ;
Quoi ? Sans vous : Blanc et Noir – Les nuances bivouaquent
Et ne révèlent plus l’immense et belle vie

Où pourtant il faut voir les silences déchus ;
- Ils sont morts ?! Pas possible ! Emportez tous les anges
Dans des cages de glaces fières et bien tenues
Et faites en sorte que les hommes les mangent

Ah ma tête est punie ! Mon corps devient un monde
Entier. Couleurs, artifices et illusions
Que je détruis toujours, que j’aime et que je sonde
Et qui bientôt ; bientôt ! Là-bas m’emporteront…

Les hommes de nos dieux, qui sont-ils sans couleurs ?
-Hein ? Quoi ? Je ne sais pas ; Qui êtes-vous d’abord ?
Apercevez au loin vos gens dans la douleur.
Vous n'y pouvez rien ! Rien ne vaut votre accord

N’est-ce pas ? Mais enfin !! L’œil dans votre miroir
Ne vous montre-il pas l’infini du néant ?
Quelle folie ; ô quelqu’un : Dieu, sorcière noire,
Ou quoi, ou rien, ou tout ! Ou ceux qui sont déviants

Parce que nous n’avons peur que de notre peur
Et nous n’avons conscience que de la conscience ;
Merde !! C’en est fini. Et que vaut la pudeur ?
Et que vaut le danger ?! Et la mère prudence ?

Je ne comprends pas la statue de plâtre blanc
Qui pèse sur le cou de ce monde en entier.
Je ne comprends pas que l'on puisse être croyant
Et je ne comprends pas que l'on puisse être athée.

Quel enfer ! Les déserts de mon incertitude
Cramoisie sous des soleils brûlants. Pitié !
Moi ! Spectre tout-puissant des sombres habitudes,
Balayeur du printemps ; moi l'enfant de l'été !

Il y a de la peinture aux murs de nos corps
Froids. Des loups qui hurlent ; des crabes de ciment
Et des gens affolés plongent par dessus-bord
Quand ils ont une fois vu ce qu'ils sont vraiment.

Mourir ? Et puis pourquoi ? Pourquoi pas vivre encore
En se saignant le corps de toutes les couleurs ?
Se changer en comète dans un bon soir d'or ;
Et crever l'inconnu dans un souffle sans peur.

Je suis né pour le contraire de toute chose :
En feignant le génie qu'un jour j'ai choisi d'être
Je me suis tué. Je n'ai pas trouvé la cause,
Seulement l'opposé révélant le paraître.


Que me valent les pleurs de nos bons soirs d'été
Quand les lacs sans fond m'avaleraient tout d'un coup ?
À quoi me servent les mots, ces mots hébétés
Quand les idées sortent de moi par de grands trous ?

Je chavire ! On m'emporte ! Couleurs ! Sauvez-moi
De moi-même. Enrobez-vous de parfums nouveaux, 
Organisez vos bataillons et vos carquois
Carillonnants ; Nous peignons là-bas, tout là-haut !!




Ecrit par Francois
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