Litanies de l'entre-deux

Désormais pour courir meilleures eaux
la nef de mon esprit hisse la voile,
laissant derrière soi mer si cruelle.
Je chanterai ce deuxième royaume
où l'âme humaine, en gravissant se purge
et de monter au ciel redevient digne.
Dante : le Purgatoire, chant 1er.

Étoiles scintillantes, multitude des anges,
Humble et parfois fautif ne réclamant louanges,

Ô vous tous dans les cieux ne me condamnez point !

N'ayant maître ni dieu je connais tout mon tort
Si jeune je rêvais, je croyais être fort,

Ô vous tous dans les cieux ne me condamnez point !

Quand aimant j'ignorais ces lois souterraines
Qui sur l'être régnant les rendent humaines,

Ô vous tous dans les cieux ne me condamnez point !

D'un bonheur trop parfait ne voyant les maudits
Sur la terre, aveuglé, croyais au Paradis

Ô vous tous dans les cieux ne me condamnez point !

Satanique attitude en voyant dans l'amante
L'orée de toute vie, quelle illusion charmante,

Ô vous tous dans les cieux ne me condamnez point !

Je n'imaginais pas quand je tombais de haut
Que cette pureté menait à l'échafaud,

Ô vous tous dans les cieux ne me condamnez point !

Quand les brillants cristaux font des mines envieuses
Les plus anodines sont peut-être précieuses,

Ô vous tous dans les cieux ne me condamnez point !

Matérialiste en diable il est des arsenaux
Dangereux et violents que je pris pour métaux,

Ô vous tous dans les cieux ne me condamnez point !

Dans un labeur ardu, ô sombres précipices
Qui masquiez ombrageux les plus beaux édifices,

Ô vous tous dans les cieux ne me condamnez point !

Et comprenant trop tard qu'il y avait un os
Mon esprit s'en allant libérait des chevaux,

Ô vous tous dans les cieux ne me condamnez point !

Saisissant un peu tard tout ce que l'homme souffre
Humblement j'enterrais pensées sentant le souffre,

Ô vous tous dans les cieux ne me condamnez point !

Ayant enfin happé tout le parfum subtil
De l'humaine pensée, vis en moi le plus vil,

Ô vous tous dans les cieux ne me condamnez point !

Ne m'imaginant plus dans les doux bras des filles
Mes trop sombres envies sont parties en guenilles,

Ô vous tous dans les cieux ne me condamnez point !

Bien attention à Faust terribles inventeurs
Ne vous transformez pas en fameux conspirateurs,

Ô vous tous dans les cieux ne me condamnez point !

Quand alors libéré, loin de toute colère
Je me confiais à vous poétiquement Père,

Ô vous tous dans les cieux ne me condamnez point !

Prière

Gloire et louange à toi, mon Dieu dans les hauteurs
Du ciel, où tu règnes, et dans les profondeurs
Du juste Purgatoire où je prie en silence
Alors te vénérant au delà de la Science,
Une douce chaleur s'épanche sur mon front
Convaincu et serein que miasmes s'épandront.


Après Baudelaire et Ombrefeuille voici ces litanies. J'ai gardé les mots de fin de vers de Baudelaire.

Ecrit par Saintes
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