Le Destin,


Je me souviens de tout !

C'est le vingt-et- un mai
que nous sommes allés au devant du Destin.
« Restez-donc avec nous »,
suppliait ma grand-mère
Mais il fallait rentrer
pour nourrir quelques bêtes
et mon père avait pris le chemin du retour.

A l'entrée du village,
une femme inquiète
tenta de nous stopper :
« Restez-donc avec nous,
il paraît qu'au village
des bandes de SS viennent de débarquer ! »

Mais la main du Destin
repoussa l'inquiétude.
Le piège était tendu
nous y sommes entrés.

Roulement de tambour,
Nos voilà rassemblés
Par des soldats brutaux
qui frappent dans le nombre.
L'horreur est annoncée
Par la tête de mort, sur tous les uniformes

Le Destin impavide nous contemple dans l'ombre.

Les fusils sont braqués
sur la foule immobile,
trois femmes sont pendues
devant nos yeux hagards.

Le Destin est muet lorsque la nuit survient
et que sonnent neuf heures.
Cinq hommes vont tomber
sans un cri, sans un mot

Puis cinq martyrs de plus
s'avancent, jeunes , beaux,
poussés à coups de crosse
et affrontent la mort.

Le Destin a frappé, le crime est consommé

La foule est dispersée,
les cadavres jetés en la fosse commune
où ils vont demeurer cinq jours sans sépulture.

La nuit s'est embrasée aux bombes incendiaires
des bourreaux ,des pillards, sous les yeux du Destin

Ce village martyr s'appelait Frayssinet-le Gélat





A la mémoire de mon père, Elisée Musqui
fusillé le 21 mai 1944 à l'âge de 29 ans .

Que jamais l'on n'oublie que les guerres sont vaines
Et que les innocents, victimes de la haine
Ne doivent plus souffrir par la main des bourreaux
Qui endeuillent le Monde en ouvrant les tombeaux




Ecrit par Marcek
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