Je suis humus

Mon cœur bat, s'accorde au rythme mélodieux du temps qui s'écoule lentement, sans empressement.

Je suis debout, mes pieds à terre comme des racines s'enfonçant dans le sol. Mon corps se tient droit et fier tel le tronc de l'arbre impassible et ma tête est une cime caressant les nuages soyeux.

Je suis celui par qui la beauté passe pour se répandre aux quatre vents, relais des hautes radiances de l'univers.

Je suis une étoile qui scintille, le pâle halo luminescent de la lune qui passe à travers les branchages épars d'une forêt dénudée en plein hiver.

Je suis la plaine enneigée, parsemée de traces dessinant d'innombrables arabesques sur ma peau blanche immaculée.

Je suis le rayon de soleil tiède du printemps qui fait fondre ce décor, faisant s'écouler l'eau dans les anfractuosités de la terre.

Je suis la source qui devient ruisseau, je suis la rivière, le torrent. Je me déplace en serpentant dans les vallées sinueuses avant de me jeter avec fougue dans le vide. Je suis éclaboussures et écume.

Je suis la mer, l'océan, le calme retrouvé après un long voyage, calme relatif, car le tumulte parfois me reprend. Je me soulève en fluides ondulations, je suis une vague, un rouleau, une lame de fond.

Je suis l'orage ténébreux qui mène la danse, le chef d'orchestre, le chorégraphe. Je me déchaîne en virulentes bourrasques, en mille éclairs fulminants, je tonne dans un grondement sourd, faisant trembler terres et cieux et, lorsque le silence revient, je suis cette sérénité palpable qui envahit tout espace.

Je suis le murmure d'un courant d'air dans les herbes folles, je suis la vaste prairies parsemée de myriades de fleurs. Je suis le mélange des ondes colorées qui s'entrelacent et la valse des exhalaisons qui se répandent en subtiles volutes enivrantes.

Je suis la pluie, porteuse de vie, douceur de l'eau qui nettoie, qui arrose. Je suis les vapeurs volatiles qui, sous l'effet du soleil, remontent en circonvolutions éthérées vers le ciel qui semble les appeler.

Je suis l'arc-en-ciel, cette subtile symphonie des couleurs, des particules de lumière diffractées qui s'illuminent telle une guirlande céleste.

Je suis la chaîne de montagnes dont les faîtes enneigés caressent les cieux, palabrent avec les astres, veillent en silence tels des gardiens impassibles sur le monde d'en-bas.

Je suis la nappe de brouillard qui franchit les cols et retombe, légère, sur les vallées en un voile cotonneux, remplit de mystère les forêts qui semblent se perdre dans le méandre flou de ma présence aussi dense qu'impalpable.

Je suis la terre, terre nourricière, fertile, terre d'abondance et la graine qui sommeille en son sein, qui attend imperturbablement le moment de se déployer. Cette graine si minuscule, mais qui pourtant, sous sa coque protectrice, contient l'entièreté de la vie.

Je suis la semence des possibles et sa terre d'accueil.
Je suis HUMUS.
Je suis HUMAIN.


© Plume au Vent, 2020




Ecrit par Plumeauvent
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