Marlou, la pipistrelle et la chouette.

Sans crinière ni panache,
Un matou de ma connaissance
Roulait carosse au creux des gouttières
Comme prince de la Savane.
A l'entendre, il avait tout vu,
Rien à apprendre, il savait tout et plus.
En leçons, il n'avait point son pareil.
A l'oeuvre, ma foi, personne ne le vit jamais.
Son doux minois et sa toison soyeuse
Faisaient si bien illusion que le marlou
Piègeait en ses filets, conquêtes
Qui à ses yeux, ne valaient guère tripette
Car bien vite, elles lui filaient entre les griffes.

Un jour que le grippeminaud
Sans raison, avait les humeurs mauvaises,
Brisa nette l'aile d'une pipistrelle
Pendue à la ferme de mon toit.
« Voilà bien une colère dont je suis coutumier.
Pour vous pardonner, je vous nomme premier ministre »
Fit-il à l'animal blessé et sans plus de défense.
Il fallut à la chauve-souris
Pour sauver ce qu'il lui restait, se confondre
En remerciement pour les largesses de son tortionnaire.

Le minet terrorisait ainsi à loisir son monde,
Les lerots comme les moineaux
Et même les petits lézards se chauffant sur l'ardoise.
Comme il ne connaissait de bornes à son domaine,
Le monarque d'opérette en vint à se frotter
A une vieille chouette qui ne se démonta pas
Aux gesticulations du roitelet autoproclamé.

C'est ainsi que la boule de poil se ratatina
Les moustaches sur mon paillasson,
« N'est-pas toi qui encombre mes nuits
De feulements désordonnés? » fis-je
- Par pitié, je suis un pauvre chat désossé,
Miaula l'hirsute visiteur.
- Voilà bien une aubaine qui tombe à point nommé.
J'ai besoin d'un manchon pour l'hiver
Qui se promet d'être rude,
Le menaçai-je de la pointe de mon couteau à beurre.

Rassurez-vous, je lui laisse volontiers
Mon banc près de l'âtre
Veillant qu'il ait moult lait et caresses,
Pourvu, pourvu qu'il partage la place avec mon Médor
Aveugle et sourd.
Je sais que le perfide félin osa
Quelques grimaces derrière mon dos.
Mais sachant bien que je pourrais
Par caprice lui briser l'échine,
Il ronronne gentiment en mon confortable giron
Pendant que les souris dansent en mon solier.

C'est las le lot des lâches
Que d'imposer sa loi aux seuls faibles.


Fond musical : “L’absence de Réminiscence”<br />
Compositeurs : Cire De Sacub et Yvalain


Ecrit par Ann
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