Pénélope et la licorme

Songeant à son mari parti voilà longtemps
Pénélope alanguie tissait bien tristement:
Elle tissait durant chaque heure et chaque jour
Pour éloigner ces gens qui lui faisaient la cour.
Elle tissait, tissait d'une main bien alerte
Un grand-voile pour la mort du vieux roi Laërte
Mais personne jamais n'aurait pu deviner
Le motif qu'inconsciente elle voulait broder.

Etrangère aux froideurs, Pénélope en effet
Connaissait des émois qu'elle savait masquer
Mais quand le soir tombait, la toile dévoilait
L'ébauche d'une bête à la blancheur de lait.
Avec sa corne au front tel un phallus dressé
La licorne naissait devant la chasteté;
Pénélope, dès lors, patronnait l'être cher
De quelques coups d'aiguille à se piquer les chairs.

La nuit dans ces orgies austères vite passe
Pour que la broderie dès l'aurore s'efface
Et bien qu'inassouvie mais ravie, soulagée
Pénélope au matin reprenait son métier:
Ajournant de nouveau l'espoir des prétendants,
Elle restait fidèle à son premier serment
Pour qu'alors sa vertu triomphe emplie de gloire
Devant l'inconstance d'Ulysse bien notoire




Ecrit par Louis Vibauver
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