L'enfer

I

La belle Humanité, que tous nous émaillons,
Fredonne chastement une vieille ballade
Où mécaniquement de longs cris de malade
Se mêlent au silence en de parfaits maillons,

Démons et mauvais heur, partageant leurs missions,
Partent disséminer dans son âme maussade
En majestueux éclats les Céline et les Sade
Et bercent ses humeurs de chaleureux rayons ;

Un avis surprenant peut traverser les portes
De l’allègre conscience et de rudes cohortes,
Avides de désirs comme de désarrois,

Se dressent pour extraire en sang et en droiture
Dans tout cerveau ravi le champ de sépulture
Où se mêlent au roc des anges et des croix.


II

L’enfer se développe à certains de nos pas …
Un collègue, un voisin, des amis, la famille,
Ou tout autre inconnu qui dans l’ardeur fourmille
Peuvent, sans un regret, prendre gout au trépas,

Souffrances, mépris, peurs génèrent les appâts
Qui travaillent les cœurs telle au blé la faucille :
La miséricorde en beaucoup un temps oscille
Jusqu’à la sélection du christique repas ;

Jésus, rempli d’espoir, allait avec l’ânesse
Aux sons des « Hosannah ! » et de la foule en liesse
Vers le mont Golgotha sur un pavé de fleurs,

Ainsi observe-t-on, à la faveur du nombre,
S’incarner en nos rangs brutalement quelque ombre
Pouvant semer la mort ou faisant fi des pleurs.





III

Dédains, dégouts, fureur viennent pour embaucher
Encore soleil, lune et étoiles rieuses,
Eclipsant dans chacun ces âmes harmonieuses
Qui se meuvent gaîment sans jamais s’accrocher.

La vanité tend puis fait les crocs de boucher
Qui recouvrent toujours nos méninges curieuses
D’une chappe de plomb sur les images pieuses
Où le souffle puissant s’élance pour faucher.

La colère se répand puis tenaille et ravage :
« Qui sera le soldat, le maçon ou le sage
Œuvrant un parapet contre tout criminel ? »,

Sa lumière embrasant nos frêles insouciances ;
Et tombent de tout front charismes, bonheur, sciences …
Souvent où sont masqués les vieux astres du ciel.





Ecrit par Nicolas
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