Ballade de la mauvaise herbe

J’ai su grandir sur les tas de fumier
Tout à côté de mille pourritures,
Bien à l’écart des gens de bénitier
À l’air gentil mais aux tristes natures,
Faux amateurs de très saintes lectures.
On me compare aux tristes épissoirs,
Me présentant tous les matins et soirs
Comme une bête au vil penchant acerbe
Et l’on dit me dit reine des désespoirs
Car je ne suis qu’un brin de mauvaise herbe.

J’ai parcouru presque le monde entier
En déposant, dans bien des aventures,
Plus de cent maux un peu comme un sorcier
Dans les jardins et parmi les cultures,
Offrant aux fleurs le temps des sépultures.
Sans aucun lien avec les ostensoirs
Mais au plus près des tristes déversoirs,
On me veut loin de la brillante gerbe
Mais voisine des si tristes pissoirs
Car je ne suis qu’un brin de mauvaise herbe.

J’ai bien connu cet étrange vivier
Où l’on peut voir de tristes créatures,
La terre grasse et son sol nourricier,
Les hommes noirs aux lourdes impostures,
Les êtres vils et leurs progénitures.
Souvent je vois briller les aspersoirs,
Chanter la vigne au fond des lourds pressoirs,
Moi qu’on maudit comme dans un proverbe ;
On m’aperçoit tout près des dépotoirs
Car je ne suis qu’un brin de mauvaise herbe.

Princes ayant de prestigieux pouvoirs
Et revêtus d’une fière superbe,
Laissez-moi vivre au cœur des repoussoirs
Car je ne suis qu’un brin de mauvaise herbe.






Ecrit par Lastours
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