J'entends venir l'hiver

Penchée à la croisée je regarde d’en haut
L’aurore que Septembre a rouillée de nouveau.
La brume violine
Fait frissonner la fleur de rosée enivrée
Un parfum de brouillard et de feuille cuivrée
Étonne les narines.

N’entends-tu pas, marcher d’un pas pesant, l’Automne ?
Le vieux poêle ronronne et la cloche résonne
Dans le matin frileux.
L’ église austère entonne un refrain qui détonne.
J’entends déjà le pas rougi et monotone
D’un hiver nauséeux.

Ne sens-tu pas la faux glaçante du faucheur ?
Dansez pauvres pécheurs dans la valse des heures !
Comme font les saisons.
Dans le miroir jauni crachant des souvenirs:
Un crucifix ridé , un chapelet soupirent
Et tremblent en haillons.

Je mis dans le tiroir le missel racorni
Et le buis des Rameaux que le prêtre bénit.
Sur la pierre souvent,
J’osais m’agenouiller et baisais mon rosaire
Adressant ma prière à la Très Sainte Mère:
Des souvenirs d’enfant.

Mais je perdis la foi, le ciel s’est abîmé.
Dans un triste hôpital la pendule affamée
Croqua ma pauvre mère.
Son supplice fut tel que je m’excommuniai.
Mes lèvres dépriaient. Le feu qui me brûlait
Embrase un ossuaire.

Il ne me reste rien qu’un lambeau de misère,
Une église défunte, un souvenir amer,
J’entends venir l’hiver.

Penchée à la croisée je regarde d’en haut
Le soleil opalin et ses rayons falots
Qui meurent doucement.
J’entends souffler le vent et son cortège d’ombres.
Je m’éteindrai aussi dans la triste pénombre
Qui grince amèrement.

Pourtant nul sacrement, et nul cierge jauni
Ne troubleront mes sens à jamais endormis.
Nulle rose fanée,
Consacrée par l’abbé n’ornera mon tombeau.
J’entends au loin le chant funèbre des corbeaux,
Et d’un écho fêlé.





Ecrit par Clementine
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