La Pétaudière

Dans la grande cour du Roi Pétaud, à l’ombre douce du château,
Du plus courtois au plus courtaud, se pressait une foule de mots.

En ce jour de liesse estivale auquel chacun s’était convié,
Un tohu-bohu indomptable n’avait de cesse de babiller.

De sequins à socquettes, de faussaires à fossettes
De causeurs à Cosettes, chacun n’en faisait qu’à ses lettres.

Mais laissons là les mots de tête et avançons dans les allées
Pour observer par la lorgnette comment cela se présentait,
Tels ces étals aux longs buvards absorbant Conteurs et Poètes,
Par de beaux livres sans mémoire reliés de rêves et de sornettes.

C’est plus à gauche, sous les arcades, que résonnaient les calembours
Des saltimbanques aux rôles fades donnant pitance aux troubadours.
Lesquels, repus de leurs scénettes, et dessoiffés à la piquette
Se moquaient des pseudo-vedettes en répliques pompeuses ou pompettes.

Mais laissons là les comédiens et contournons par les jardins,
Où quelques coquets musiciens chantaient le cœur et ses refrains.

Ainsi, soprano et ténor, grisés de notes à tête de croche,
Titubaient sur leurs « Fin’amor » pour toute dame en approche.
Qu’elles fussent pétales d’aquarelles, de noble essence ou d’églantine,
Les roses s’offraient aux ménestrels jonglant de bourgeons en épines.

Mais laissons là les damoiseaux épris d’amour et de cueillette,
La Tour de gué aux fiers créneaux nous réservant joutes et défaites.

Ainsi, de glorieux chevaliers sans tête, parce qu’adoubés un jour de fête,
Luttaient contre de lourds blasons d’où s’échappaient quelques dragons.
Tandis que sous les hauts préaux, écuyers et beaux destriers
Pariaient victoires sur leur héros avec pirates et barbautiers.

Alors qu’au pied de la muraille, chants de batailles, chants de bateaux,
Salaient les jeux de la marmaille dont s’offusquaient de noirs manteaux.

Apostropher cette turbulence, puis en ces lieux quêter silence.
De cette pléthore de jolis mots, choisir celui au moindre écho.

Graziella




Ecrit par Graziella
Tous droits réservés ©
Lespoetes.net