Le nez au vent


Rappelle-toi le temps jadis où nous allions
Le nez au vent, le cœur léger, la tête aux nues,
Et souviens-toi des jours passés où nous courions
Main dans la main, où nous flânions le long des rues.

Avons-nous donc si tôt vieilli, si peu vécu,
Que s'est fané l'effleurement de nos sourires ?
Que n'avons-nous saisi l'ailleurs entraperçu ?
Lors nous pleurons, je me désole et tu soupires.

Il eût fallu chanter, danser, nous réjouir
Des fleurs de l'aube et de la brume au vol immense,
Il eût fallu laisser la nuit nous éblouir
Et le cosmos nous caresser de son silence.

Mais nous avons scellé la pierre où se cachait,
Où se tenait, insoupçonnée, la clef des mondes,
Et nous avons cessé de voir que s'asséchait
L'ombre du puits qui murmurait nos eaux profondes.

Trouverons-nous au soir dernier le prime élan
Qui nous fera sans peur aucune ouvrir nos portes ?
Toucherons-nous, quand nous irons le nez au vent,
Ce ciel plus pur qui renaîtra des feuilles mortes ?







Une quadruple métaphore sous-tend l'inspiration de ce poème :
- Les regrets éprouvés au soir d'une vie passée en futilités ;
- La fin d'une relation amicale ou amoureuse ;
- La déroute du vivre-ensemble dans un contexte de crispation religieuse
et idéologique et de radicalisation des prises de position ;
- L'épidémie de covid-19 qui, en compliquant ce qui autrefois était
simple et naturel, nous fait éprouver combien il importe de cultiver
les joies modestes du quotidien.




Ecrit par Ombrefeuille
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