Masochisme en amour

"Homme libre, toujours tu chériras la mer !" *
Oublions juste à temps les longs adieux en pleurs
Même si dès que mon sombre navire avance
Mille frissons glacés font trembler tous les cœurs
Et l’on se prend à dire : Est fou qui point n’y pense !

Les vents à tour de rôle étant consolateurs,
Il faut veiller, de quart, à leur bonne incidence !
Berce mon cœur, enfin, tempête de malheur !
Râle trop la membrure? ajustons la portance,
Et que l’on chante enfin, y trouvant du bonheur !

Tout bien pesé, ainsi finit le premier quart :
Ordres transmis à qui vient prendre la relève...
Un peu sommeil ? ... Enfin, l'on dit que ça répare :
Je vais te retrouver aussitôt dans mon rêve...
Or je rêvais déjà, tout en tenant la barre :
Ulysse est le surnom que m’accordent tes lèvres…
Retrouvant leur sourire amoureux plein d’égards
Sans rancune avouer pour l’escale trop brève…

Tu sais très bien qu’en mer je ne songe qu’à toi !
Un ouragan jamais n’altèrera ma foi !

Chacun des reflets verts de l’océan soulève
Haut dans le ciel de sa romance notre choix :
Eminemment sublime est celui de l’épreuve
Renouvelée à chaque appel d’embarquement
Indispensable à la valeur de toute chose
Relève l’art sacré d’aimer durablement
Au fondement des plus belles métamorphoses
S’accomplissant ainsi que les miracles peuvent…

Loin de l’usure des mornes couples plan-plan
Ayons recours au songe qui va décuplant

Mentalement tous nos plaisirs tant différés
Et, composant ainsi nos poèmes ardents,
Ressuscitons déjà nos amours éthérées !


* Acrostiche de ce premier vers de
"L'homme et la mer", de Baudelaire.


Ecrit par CinquiemeVallee
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