Les Tables de la Loi

« Ce sont Les Tables de la Loi ! » dit-il

Avec ses ongles usés comme des marches d’escalier, il gratte, non pas pour gagner quelques millions, mais pour inscrire ses propres traces à coups de griffes, de glyphes indescriptibles comme l’empreinte de son être. .

Ce sont ses tables de la loi,

Les infirmiers et les femmes d’ouvrage n’y voient que d’immonde et d’obscènes graffitis. Mais ils sont eux-mêmes hors scène et sûrement même hors-jeu !

Alors, Marcel récidive le trait, il rechute de la tache, il œuvre de la trace, redouble d’effort, de tâche et de performance graphique.

Comme il y a des bêtes de somme, Marcel est un homme de trait !

Il affirme à corps et à cris qu’il écrit sa propre version du Codex Sinaiticus sur les murs de séparation, et le long des couloirs, vous savez, ceux qui se parent régulièrement de tags infâmes que l’on s’empresse de nettoyer ; de ceux qui séparent symboliquement les mauvais du dedans des bons du dehors, et qui de même, coupent les beaux Anges de là haut des piètres démons de l’en bas.

Comme les juifs les plus pieux glissent dans les fentes du Hakotel, « le Mur » des Lamentations, des papiers sur lesquels ils ont inscrit leurs vœux et prières ; Marcel, de même, glisse précautionneusement ses petits papiers dans tous les recoins saints, les interstices interdits et les renfoncements obscurs, comme pour boucher quelques failles que l’on dit schizoïdes.

Il assure avec dévotion que les morceaux de papier toilette qu’il a plié et replié religieusement, sont des papyrus rares...,

" vieux de plus de deux mille ans", souligne-t-il avec le plus grand respect.

Et comme pour les juifs, Le Mur est l'endroit le plus saint pour la prière, Marcel honore aussi ses couloirs comme des lieux solennels, des iconostases et des chemins vers le ciel.

Au pavillon des Anges, franchir un couloir, c’est ainsi prendre conscience que l’on passe par le Saint des Saints ! Et qu’il serait bon de se déchausser comme Moïse, de marcher sur le carrelage comme Jésus sur l’eau, de passer les portes comme Alice aux Pays des Merveilles. De laisser là le Chapelier fou pour rencontrer Marcel, le saint homme et l’artiste, bien qu’il nous dise que son vrai nom soit Moussa. Qu’il est inspiré comme un prophète par un Ange du nom de Matamaël, et que le Pavillon est un temple, situé sur le mont de Vénus.

Mais qui à raison ?

Seuls ceux qui vénèrent vraiment les couloirs comme des lieux de prière et de recueillement peuvent connaitre la vérité tout entière.

Et de même, seuls ceux qui respectent les murs comme des lieux de ressourcements, des cimaises avec des toiles de Maître, et le papier comme le support sacré de tous les états d’âme, peuvent savoir qui à vraiment tord ?




Ecrit par Reumond
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