Sonnet

Sur les marbres massifs plane la paix de l'air.
La nature, qui hait la fièvre et le factice,
Décore les tombaux, passive protectrice,
De rosée au printemps et de neige en hiver.

Le souffle égal des Morts s'en va vers le ciel clair.
Ils rêvent gravement : leur sottise et leur vice
Sont devenus de l'herbe et des fleurs sans malice ;
Le lys pur a puisé ses parfums dans leur chair.

Une chauve-souris parfois rôde et s'égare
D'un vol supplicié, tortueux et bizarre,
Ainsi qu'une âme en peine errant près des autels.

Ayant seuls la pudeur et l'orgueil de se taire,
Ces vivants de la veille, inquiets et cruels,
Sont devenus sereins et bons comme la terre.


Évocations – Alphonse Lemerre - 1903

Ecrit par Renée VIVIEN
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