Ballade pour un marin breton

Un jour qu’il péchait à la drège*,
Loin de sa patrie, le Léon,
Il prit une sirène au piège.
Il levait déjà le harpon
Sur sa conquête, qu’un typhon
Fit chavirer l’homme et sa jonque.
Pour fêter la bonne moisson,
Lors la fée souffla dans sa conque.

Roi Triton comme un privilège,
Offrit sa fille au pauvre garçon.
Décliner serait sacrilège.
Elle riait de tous ses fanons
Et sentait fort le goémon.
Gorgone ensorcelait quiconque,
Poil au nez, écaille au téton.
Lors la fée souffla dans sa conque.

Les cloches hélaient le cortège
Une huitre lâcha sans façon
Des perles fines, le Saint-Siège
Oint par un filet de citron
L’épouse et son marin breton.
Il fallut que sa caudale il tronque,
Ainsi consomma leur union.
Lors la fée souffla dans sa conque.

De sa moitié, il implora le pardon…
N’était qu’un poisson quelconque
Une femme-tronc, un vulgaire thon.
Lors la fée souffla dans sa conque.

Extrait Des enfants du bord de mer


La drège est un filet pour attraper le gros poisson.

Ecrit par Ann
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