Chez Madame Antonia

Dans une rue perdue, celle du Grand Bohu,
Entre le troquet "L'Harmonie"
Et un marchand de parapluies,
Un immeuble miteux, aux escaliers de gueux,
Voit passer, le coeur incertain,
Des quémandeurs de lendemains.


Sur une plaque d'or, aux reflets de Miror,
Je lis : "Chez Madame Antonia
Entrez sans bruit, ne fumez pas !"
Sur un coussin brodé au fusain, un chat noir,
Sortant d'un rêve prémonitoire,
Me regarde, poils goguenards.


Lorsqu'elle vient me chercher, à petits pas feutrés,
J'observe ses pendants d'oreilles,
Sa chevelure de corneille.
Un mystérieux parfum d'oliban et d'encens,
Des grands yeux de charbon de bois
Interpellent le consultant.


A la table des esprits, les mauvais présages
Côtoient arcanes et lames,
Horoscope et Mirascope.
"Je vois, je vois, je vois... dit Madame Antonia,
Oh ! De Saturne les anneaux,
Des papillons et des flambeaux".


Quelques mots cabalistiques, et le tour est joué !
"Méfiez-vous de la mandragore,
D'un voisin jeteur de sorts !
Oh ! J'entends, j'entends... un air lointain d'harmonica.
Le facteur sonne toujours deux fois !
Oh ! Lala... Abracadabra !"


Cesse la sarabande des pendants d'oreilles,
Des flashs, des tarots de Marseille.
La pythonisse est fatiguée.
Sur un coussin brodé au fusain, le chat noir,
Sortant d'un rêve prémonitoire,
Me regarde, poils goguenards !



Automnale






Ecrit par Automnale
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