Le deuil d'un ami

Sans pouvoir adoucir ta détresse nous somme là,
C’est tout ; comme des ombres grises nous sommes là.
Le chagrin ne se laisse pas apprivoiser
Quand il enserre un ami à la gorge nouée.
Nos mots inutiles coincés lourds sur nos cœurs
Nous attendons muets entre les fleurs et les pleurs
Incapables d’atténuer ton affliction
Rongeant à l’homme son sang et sa raison
Te figeant comme statue de marbre blanc
Ton regard vide de larmes, agonisant
Loin de la salle sans âme où nous sommes.
Sur ton épaule que mille peines assomment
Pudiquement nos mains amicales se posent
Qui te disent ce que nos paroles n’osent.
En silence à tes côtés, c’est notre sort
Invisibles amis, tu nous fiches dehors.
En tête à tête avec des souvenirs doux,
En vieux solitaire tu veux tordre le cou
A ta souffrance, à coups de vieilles photos
Qui tirées de l’oubli apaiseront tes maux
Comme des enfants pris en faute on s’efface
Raides dans nos habits sombres, têtes basses
Quand la douleur moins oppressante se fera
Comme avant de banalités, tu souriras.
Un beau matin sur le perron de ta maison
Tous ensembles le nez au ciel nous rirons
Et les croque-morts glisseront tout à l’heure
C’est notre fatale issue à tous quand on meure-
La lourde pierre mortuaire sur le néant
Tu nous parleras d’elle et nous écouterons
Toute la nuit noire, ce que déjà nous savons
Et d’entre les murs son parfum s’échappera
Son tablier pendu au clou s’animera
D’une brise légère qui s’engouffre vite
Par la fenêtre offerte à l’âme qui s'invite
Dans les mouvements familiers et affables
Il tournera autour de la longue table
Versant à tous le café fumant dans les bols
Et la goutte qui délie enfin la parole.




Ecrit par Ann
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