Enfants qui vous aimez

C'était un jeu de dés
Pipés au hasard de la vie :
Côtés pairs effacés
Pour que les impairs en folie
Truquant les coups lancés
Perdent toujours. Nulle énergie
Ne survit à la tricherie.

Premiers printemps passés.
La joie d'abord, était partie,
Jetant rêves dorés
Dans un puits comme les scories
De toute éternité.
Une âme, la plus démunie,
Voyait venir son agonie.

Agneaux qui vous aimez,
N'oubliez pas le loup caché...

L'enfant d'ailleurs est né.
Son petit lit plein d'espérance
Empli d'objets sucrés,
De porte-bonheur et d'aisance
Et sa mère, à danser,
Passait le jour de circonstance,
Enivrée par cette existence.

Comment imaginer
La misère, la permanence
Des horreurs du passé
Qui retrouvent leur importance
Autour du nouveau-né ?
Ne subsiste dans nos silences
Que chaos des interférences.

Enfants qui vous aimez,
N'oubliez pas le grain semé.

De ce que l'on a vu,
Les blessures sont transcendantes.
Chaque point combattu
Ouvre des plaies sanguinolentes
Dont on ne revient plus.
Les belles amours sont absentes
Les jours comme les nuits nous mentent.

Lorsque l'alcool est bu
Les douleurs, autrement, serpentent
Le Nord est tout perdu
Le Sud, autant, dans la descente,
Au ciel noir suspendu
De la spirale omnipotente,
Le centre du cœur en tourmente.

Enfants qui vous aimez,
N'oubliez pas la vérité.

On regarde ses mains
Dont la blancheur était si douce...
Tremblent pour le demain
Toutes celles que la peur pousse
Avec la haine enfin
Sortie des yeux de Barberousse
À fuir le destin à leurs trousses.

Pour un peu d'eau, de pain,
Le danger conserve le doute.
On n'imagine pas, cousin,
La pourriture sous la croûte,
Ni, dans les magasins,
Toute religion dissoute,
Piller l'autre, coûte que coûte...

Voyous qui vous aimez,
N'oubliez de vous déchausser.

De ce que l'on connaît,
L'histoire paraît plus facile
Et cependant l'on sait
Mentir pour être plus docile.
Sens absent, imparfait,
Des gouffres noircis de la ville
Où plus de chanvre que d'utile.

L'accent ensoleillé
Posé sur la loi du silence
A pris la liberté
En otage : Quoi qu'on en pense
On ne peut en parler
Sur cette terre de l'errance
Où s'est vendue même l'enfance.

Enfants qui vous aimez,
N'oubliez de vous respecter.

Partout, lorsque les dieux
Meurent, ne reste plus de rêve
Ni prières qu'aux cieux
Les vivants font pour que s'élève
Au-dessus d'eux, monsieur,
Le soleil blanc d'amour, sans trêve,
Et non le fer, place de Grèves.

C'était un jeu de dés
Pipés au hasard de la vie :
Côtés pairs effacés
Pour que les impairs en folie
Truquant les coups lancés
Perdent toujours. Nulle énergie
Ne survit à la tricherie.


Décomposition©M.KISSINE – ISBN 9782919390274
DLE 20150929-55400


23 OCTOBRE 2016

Ecrit par Madykissine
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