Parmi tant de mystères, il est l'Ankou des mers

Il vit en invincible, sur un bateau sans voiles,
Tiré par des chevaux surgis de l'océan,
C'est l'Ankou voyageant par les nuits sans étoiles,
Drapé dans ses haillons malmenés par le vent.

N'ayant pour seuls bagages que sa hargne et sa faux,
Aussi blanc qu'un linceul, toujours debout, bien droit...
L'homme, haute silhouette emportée par les flots,
Navigue en boucanier, porteur de désespoir...

Et c'est au fond d'un gouffre tout ruisselant d'horreurs
Où s'entassent déjà des os presque oubliés,
Qu'ils mène la moisson de son affreux labeur,
Dans des sacs plombés de mille éternités.

Juste un souffle puissant retrousse la crinière
Des chevaux furibonds aux naseaux écumants
Et la main décharnée de l'Ankou de la mer
S'accroche à cette faux d'un geste menaçant.

Ecoutez dans l'espace ces râles, ces grincement :
Anathème lancé en tant de cris funèbres...
S'affole en passant le vol des goélands,
Quand la brume se fond à l'encre des ténèbres.

Et même certains soirs, parmi tous ces écueils,
On devine, apportés par la vague troublée,
Comme de grands soupirs et de mornes appels...
Tristes, tristes adieux du peuple des noyés.

Il est à l'horizon, par les nuits sans étoiles,
Une ombre fantastique que portent les courants,
Une ombre qui apeure et qui glace la moelle
De ces marins rivés aux flancs de l'océan.

C'est l'histoire préférée d' un vieux loup solitaire,
Qui s'en vient quelques fois au " café des embruns ",
Il accroche à ses mots des touches de mystère
Pour parler des abysses et des monstres marins.


Celui qui attend que tout danger soit écarté pour mettre les voiles ne prendra jamais la mer.<br />
Thomas Fuller


Ecrit par Mijo
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