J'étais de ceux

J'étais de ceux qui pensaient pouvoir tout écrire
Tout transcrire tout décrire
Que tout pouvait se traduire
Pour un lecteur qui n'a plus qu'à nous lire.

J'étais de ceux qui pensaient l'écriture comme un vecteur universel
Qu'on pouvait coucher sur la feuille notre fiel ou notre miel
Mettre du sucre ou du sel
Des vagues et des étincelles
Dessiner en quelques mots
L'essentiel et le superficiel
Les Hommes la Terre et le ciel.

Je pensais être de ces alchimistes du verbe
Qui pouvaient faire de l'or avec quelques gouttes d'encre
Qu'il suffisait des quelques traits d'une plume acerbe
Pour faire voyager le lecteur et lui faire lever l'ancre.

Je pensais qu'aucun sentiment, aucune émotion
Ne saurait être imprimée sur une page blanche.
Je dois l'admettre avec résignation
La vie sur le Poète aura eu sa revanche.

Car oui cette quête est vaine
La poésie coule encore dans mes veines
Mais je le reconnais j'ai beau écouter mon cœur
J'ai beau enjoliver la réalité de mots enchanteurs
La vérité est passée au révélateur
Il y a aujourd'hui des bonheurs
Que je ne sais pas retranscrire.
Des joies si immenses que même la plus grande des plumes ne ferait que réduire.

J'étais de ceux qui pensaient pouvoir tout écrire
Tout transcrire tout décrire
Que tout pouvait se traduire
Le meilleur comme le pire
Le malheur comme le sourire.

J'en étais, mais ça c'était avant !
Avant de connaître le plus grand des firmaments
Avant de connaître ce bonheur d'être parent.
Avant de connaître tous ces moments
Les plus émouvants aussi parfois les plus stressants
Avant de voir une paire de bras qui se tend
Et une petite voix crier Papa avec un sourire géant
Les yeux grands comme deux océans.

Oui, ce genre de petit bonheur
Lorsque ma fille me tend son coeur
Aucune phrase, aucun poème
Ne peut transcrire ce que cela me donne.
Devant tant de pureté, c'est la plume qui abandonne.




Ecrit par YonL
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