La chanteuse oubiée
Je me souviens de toi, de ton joli sourire
Tu chantais Edith Piaf, la Gréco, Barbara
Une salle enfumée, jamais rien vu de pire
Un infâme tripot baptisé Alhambra
Dans ce port étranger à l’autre bout du monde
Tu avais échoué dans un bouge à marins
Oubliant pour toujours que notre terre est ronde
Qu’il y avait pourtant d’innombrables chemins
Quelle idée m’a poussé à entrer dans la cave
Alors que je flânais dans la rue nez au vent
Je venais d’arriver sur un cargo Batave
Sans savoir que faire pour me passer le temps
Aucune réaction à mon entrée discrète
Pourtant ton beau regard s’était porté vers moi
J’ai senti aussitôt une entente secrète
Et me suis approché de l’estrade de bois
Ton tour de chant fini, tu venais me rejoindre
Tes premiers mots étaient : dis-moi, tu es Français !
J’ai dis oui en effet et alors j’ai vu poindre
Des larmes de bonheur dans ce bouiboui Malais
Tout au fond du troquet, où nous avions pris place
Tu m’as parlé de toi, de ton cruel parcours
Alors que tu vivais dans le luxe, un palace
Tu as suivi un fou, de Cannes à Singapour
Je suis monté chez toi, dans ta pauvre chambrette
Tu ne m’as rien offert, je n’ai rien demandé
Toute la nuit durant, une longue causette
Autour de la France, ton pays bien-aimé
Je me souviens de toi, de ton triste sourire
Quand au petit matin, nous nous sommes quittés
Ton baiser sur ma joue voulait pourtant me dire
Que des rais de soleil je t’avais apportés
Ecrit par Anacreodes
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