Cantate
Avec l’envers des mers à boire,
Tout ce sable, et la plage noire
Livrée avec toute l’histoire,
Les souvenirs s’en vont rêvant,
Les souvenirs, bien plus qu’avant,
Ne sont en somme que du vent !
Ne vois-tu rien venir sœur Anne ?
De ce passé qui tant ricane
Telle une hyène à la savane…
Au degré suprême des cœurs
Les amours nourrissent de pleurs
Le vin des anges vendangeurs ;
Solitude, ô joie interdite,
Tout désir reste hermaphrodite,
Croît des absences qu’il crédite !
D’épouvantables horizons,
A la roulette où nous misons,
Russe, il surgira des prisons
Où viendra s’enferrer notre âme,
Qu’on soit un homme, ou d’une flamme,
Brûlant des fleurs pâles de femme…
S’il n’est, d’espoir, que déité
Fausse, et toute banalité
Que de se croire illimité,
Contempler la vie infinie
Et concevoir ce que l’on nie,
Jouet de l’alme tyrannie
Qui nous promet ce court martyr
Où nous sommes sûr de partir
Vers un néant sans repentir…
Lors de pleurer nos amours mortes
Et penser réouvrir les portes,
C’est nier ce que tu supportes,
Dieu, d’angoisse et de mâle peur
Devant l’âge exterminateur
Et le jeu faux de tout acteur,
Sur cette scène où l’éphémère
Est de nous tous l’horrible mère
Allaitant, placide outre amère,
Tous ses enfants de ses cent sucs,
Nous aurons beau nous perdre en stucs,
Mais ces décors nous seront trucs !
Avec l’envers des mers à boire,
Fors le sable, et la page noire,
Livrée avec la sombre histoire…
Ecrit par Salus
Tous droits réservés ©