Le jardin de grand-mère

« Que ton jardin est beau ! » Lui disait petit Pierre
En écoutant le feu crépiter dans son dos,
« Tes roses, tes lilas, ô ma douce grand-mère »
Cependant que la pluie dansait sur les carreaux.

« Si le gel a poudré tes fleurs de sortilèges :
Tous les coquelicots et tous les liserons,
Si l’hiver a jeté leurs bourgeons sous la neige,
Sous les horizons bleus, tes lys refleuriront. »

« Je sais que le printemps, facétieux et timide,
Revient, à petits pas, réveiller ton jardin,
Il se fait malicieux et je compte les rides
Qui cernent ton front nu et courent sur tes mains. »

« Allons ! Dépêche-toi ! Viens donc pousser sa porte,
Toi qui promets toujours et souvent la déçois !
Et, pour la réchauffer, fais-lui comme une escorte,
Elle n’a plus vingt ans et n’attend plus que toi. »

« Privée de son amour, perdue et solitaire,
-La vieillesse, aujourd’hui, est son unique écho-
Avant que le soleil, avare et lapidaire,
Ne fige son corps las, étends ton doux manteau ! »

Près des fleurs convoitées, ses vieilles mains s’affairent,
« Accorde-lui la joie -il en reste si peu-
Et le temps de goûter ce plaisir éphémère,
Avant d’aller biner les Jardins du Bon Dieu. »


Ecrit par Antigone
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