Ballade de la génération artificielle
par Laurent TAILHADE
Wagner, chimiste qu'exténue
Le grimoire du nécromant,
Distille, au fond de sa cornue,
La salamandre et l'excrément,
Et le crapaud que, doctement,
Assaisonne la verte oseille,
Pour que soit clos, en un moment,
L'homoncule dans la bouteille.
Catarrheux, il étreint la Nue.
Fi de la Belle-au-Bois-Dormant !
Fi de la galloyse charnue,
Du mignon et de la jument !
Gautâma ! Le renoncement
Absolu que Ton Doigt conseille
Préside à cet accouchement :
L'homoncule dans la bouteille.
Plus de vérole saugrenue !
Plus d'argent-vif ou d'orpiment !
Hélène, avec sa beauté nue,
Intoxique le jeune Amant.
… vous donc tout simplement,
Au coin du feu, sous une treille :
Puis décantez modestement
L'homoncule dans la bouteille.
ENVOI
Fleur des gitons, Prince Charmant,
Nonpareille est cette merveille
Offerte à votre étonnement :
L'homoncule dans une bouteille.
Méphistophélès – Un homme ! Et quel couple amoureux avez-vous donc enfermé dans la cheminée ? Ce poème a été vérifié et le contenu authentifié.
Wagner – Dieu me garde ! L'ancienne mode d'engendrer, nous l'avons reconnue pour une véritable plaisanterie. - … Nous tentons d'expérimenter judicieusement ce qu'on appelait les forces de la Nature ; et ce qu'elle produisait jadis organisé, nous autres, nous le faisons cristalliser. (Goethe, Le Second Faust)
- Au pays du mufle (1891) - Ed.: Orphée, La Différence
Poème posté le 22/09/22
par Jim