Lucile en ville.
par Alf
En ville,
Le blé ne se moissonne qu'aux Champs Elysées,
Le bétail rumine à la Porte de Versailles,
Sur le béton repose le foin et la paille.
Souterraines, des rivières canalisées
Charrient les déchets citadins vers les égouts.
Emprisonnées roses, lilas et autres fleurs
Diffusent leur parfum en vaporisateur
Se mêlant aux relents souffrés jusqu'au dégoût.
En ville,
Néons violents aveuglent la voûte étoilée,
De pâles lueurs des lucarnes virtuelles
S'empilent en damier vers le haut des tours jumelles
Hypnotisant la cité toute constellée.
Errants, les sans abris dépourvus de cocons
Se réchauffent les mains autour d'un brasero ;
Certains se pressent dans les bouches de métro
Quand ils ne squattent pas une pile de pont.
En ville,
Perdue dans la grisaille émerge aussi une île,
Baignée par le soleil, son prénom est Lucile.
En ville, avec Lucile,
Les tristes avenues me semblent des prairies
Parsemées de boutons dor et de pâquerettes
Le décor idéal pour se conter fleurette
Propice à nos caresses et nos cajoleries.
Dans sa chevelure dorée comme les blés
Une douce brise ondule les blonds épis.
Sa bouche groseille à saveur de génépi
Au goût d'absinthe que je déguste, comblé !
En ville avec Lucile,
En suspension dans une bulle transparente
Plus rien ne nous atteint ; dans la foule maussade
Parmi les mines déconfites, on se ballade
D'une foulée légère, alerte et insouciante.
Je ne perçois plus les tristes tours en béton
Les façades taggées, le bruit sourd des autos
La mauvaise humeur latente des Parigots
J'ai pour seul horizon ses beaux yeux bleus lagon.
Poème posté le 01/03/04