Mars
par Libeyre
Mars. Le citronnier est encore à l’abri.
À travers la vitre il guette avec envie
la lumière qui s’épanche entre les branches
encore nues du frêne et sur la peau blanche
des deux bouleaux graciles. Et derrière eux
la cime des pins balance dans le bleu
les bouquets touffus de leurs aiguilles vertes
qui rient doucement des branches découvertes,
des chefs nus des feuillus tondus par l’hiver.
Dans le potager où travaillent les vers,
entre les mottes griffées par la serfouette
émergent, timides, les premières têtes
encore tendres, des fèves et des pois.
Le ruisseau se hasarde à sortir du bois,
tout ragaillardi par les pluies de l’hiver,
jette son grelot dans la fraîcheur de l’air,
sur les rochers polis fait de petits bonds
avant de paresser sur le sable blond.
Quatre jonquilles et trois narcisses hochent
la tête en voyant le lierre qui s’accroche
au tronc du vieux chêne et regardent de haut
les violettes brodées de perles d’eau
qui cachent dans l’herbe leur fierté discrète,
tandis que s’égaient au pré les pâquerettes,
de leurs robes à franges blanches parées
qui auréolent leurs petits cœurs dorés.
Mais soudain un nuage joueur tout gris
vient tirer par la barbe un soleil surpris
que ce jeune importun lui passe devant.
Mars. L’ondée sourit aux caprices du vent.
Poème posté le 08/04/21
par Libeyre