Pâtures
par Gkak
Les grands sapins s’ébrouent, lanceurs de sortilèges.
Se faufilant au ras des crêtes qui s’enneigent,
Va déferler bientôt, glacial, le vent d’autan.
L’été mourra. Déjà dans le lointain s’entend
Lancinante douleur que nul répit n’abrège
La complainte obstinée d’une louve et son loup.
Un corbeau lâche un cri et plonge au crépuscule.
Le ru se fait sonore. Autour de moi s’agrègent
Les brebis apeurées par le jour qui recule
Ou l’éboulis brutal d’un pierrier, rude arpège.
Dans l’or du soir, la laine blanche devient beige
Et le troupeau tapi parait un gros caillou.
Le silence se noue. De temps à autre expire
Le métal bossué d’une vieille sonnaille.
Mon œil glisse parmi l’innombrable piétaille
Des étoiles dorées incendiant leur empire
Jusqu’à cette bluette, infime, qu’un lampyre
Veut tenir allumée, dans l’herbe, jusqu‘au bout.
***
Quand tes yeux vigilants, par-delà les broussailles
Fixent la bergerie, bien plus vaste que Tout,
Où chaque univers luit tel un fétu de paille,
À quoi donc penses-tu, mon fidèle Patou ?
Poème posté le 02/05/21
par Gkak