Homme esclave ! Toujours, tu chériras ta chaîne
Qui, sur galère aimée, te fait chanter ta haine !
Tu aimes ta douleur, par elle tu existes,
Bien que la maudissant, en elle tu persistes.
On ne parle aujourd'hui nullement de métiers,
Mais bien plutôt de jobs ! Il faut être flexible !
Pourquoi perdre son temps à longtemps étudier
Quand chacun peut sauter comme un simple fusible ?
Nul besoin de savoir l'origine des choses,
De répéter le noble geste patiemment,
Quand le savoir est devenu lente sclérose.
Procédure et réflexe, agir inconsciemment,
Voilà qui suffit bien aux marchés radieux
Pour que s'élève, au firmament du virtuel,
L'actif concélébré sur l'autel de l'odieux !
Dans l'artifice, il faut demeurer factuel
Et, dans l'école, s'obliger au rituel
Qui tue l'universel devenu fastidieux !
Il n'est d'autre avenir, qui ne soit défendable,
Pour ce gus dont on veille à maintenir la faim,
Que celui de courir après le consommable,
Tout en veillant que sa fringale n'ait de fin.
Sans cesse accumuler des trucs et des machins,
Dans le but de calmer, ce qui ne doit pas l'être
En dopant ses envies par pub et par crachin,
Quand vivre est un sitcom, l'e-phone sa fenêtre !
Devenu toutou mou, content de son brouet,
D'un susucre donné que l'on nomme Jésus,
Craignant que soit perdu ce qu'il n'a jamais eu,
L'orgueil d'être vivant signé d'un coup de fouet,
De perdre cette vie qui n'est plus que mouroir,
Et que lui soit laissé, comme ultime jouet,
Le sûr confort du grain qui dort sous le pressoir,
Seule ta peur te fit par ton enfant floué !