Je suis le pèlerin d’un monde
dont le seul but est de marcher,
car si je suis encore en vie,
malgré le froid et la fatigue
malgré mon peu d’envie de vivre,
je marcherai encore, encore,
du soir à la prochaine aurore
sans cri, sans pleurs et sans broncher
je marcherai, je marcherai…
Sur les durs sentiers de la vie
sur des routes parfois fleuries
mais plus souvent semées d’embûches,
même si sont tombés mes proches,
si je trébuche, je suis ma route,
malgré mes peines et mes déroutes,
il faudra bien me relever,
toujours marcher, toujours marcher…
A présent, quand je vois la mort
courir à grandes enjambées
pour chercher à me rattraper,
montent en moi des bruits de port,
tristes échos de tous mes morts
venus mettre à jour mon destin,
et je perçois dans le lointain
comme un appel si fort, si proche,
le rire des uns, les pleurs des autres
nimbés des subtiles lumières
de nos printemps, de nos hiers…
Oui, je repense à nos bonheurs,
je pense à ceux qui en chemin
sont tombés et sont morts pour rien,
et à ces autres pèlerins
fourbus de marcher sans répit,
et meurent d’être encore en vie.