Une amie a glissé sa peau nue
Dans les plis de mon souffle natal
Sans bruit, sans ondoiement d’air,
Comme une loutre transparente
Se glisse dans la fontaine
Sans distordre le disque du soleil,
Une amie ? hier je le sus à peine,
Car alors j’avais les yeux fragiles
Dans leurs paupières de lait enclavés
Et miroirs des mamelons enneigés
Elle manquait aussi de visage et souvent
C’était un écoulement de silence
A travers mes mains incertaines,
Ou semblait n’être qu’une ombre
Accoudée à l’aile du faucon
Haut dans les combles des rêves,
Enfin plus tard devînt une amie vraie
Me tenant la main dans les roselières
De l’enfance et m’attendant
À l’orée des chemins bruyants
Tel un chien effrayé et fidèle
A la mamelle gonflée de ciel
Elle fut parfois comme ce corbeau
Que la nuit à la fin du crépuscule
Efface de son glaive de suie,
Mais le mouvement de la pénombre
N’était finalement que le déplacement
Perpétuel de mon peuple d’ombres
Allant et venant de nulle part
La silhouette éreintée, le pas alourdit
D’un glacier occupé à désosser les collines,
Et enfin, comme allant seul et silencieux
Vers la porte sans battant ni serrure,
Je sens à peine la main de la solitude
peser sur mon âme.