Entre l’amour et l’ennui
par Lamapola
Entre la rose rouge et le noir des ébènes
Je suis l’amère orange. Au vent des alizés,
Du haut des gratte-ciel aux vestiges d’Athènes :
Des éboulis de cœur et de rêves brisés.
Je suis l’heure arrêtée au clocher du village,
L’innocence candeur parmi les médisants.
Sur la cire fondue et chaude je suis l’âge
Gouttant sur le gâteau de mes premiers dix ans.
Sur l’éponge d’eau douce essuyant cette table
Je suis : Miettes de pain. L’humus des longs hivers.
La farce devenue un soir inacceptable
Quand je vole d’amour dans un autre univers.
Je suis la main qui cueille une autre marguerite.
Le frisson de l’automne et de l’effeuillaison.
Des pétales tombés sous le toit qui m’abrite
L’être enseveli dans sa funeste maison.
Terre cent fois meurtrie et si chère à mon rêve,
Maintes fois interdite au même maraudeur.
Aux essences d’amour je suis le nez qui crève
D’envie inassouvie de sentir son odeur.
Son prénom endormi sous ma langue soulève
Des traverses de mots d’antan, moyenâgeux,
Que ma langue entrouverte au ciel du mont-Salève
Égare ses baisers dans le manteau neigeux.
J’ai froid. Tant ! Que je tremble… Équilibré sur l’axe
De pucelles amours, d’actes bien affranchis.
Ô belle adolescente ! Ô comme elle malaxe
Le chaume de nos cœurs dans le même torchis !
Ô femme ! Devenue : Unique. La dernière.
L’ultime acte d’amour. Mon sexe évanoui
Se réveille parfois seul dans sa garçonnière
Comme un pêché de chair, de poussière et d’ennui.
Dans le mouchoir je suis l’œil du borgne qui pleure
Sa moitié disparue… Et dans l’œil du poisson,
Entre des jambes d’homme, accroché comme un leurre,
Un sexe qui vivote au bout de l’hameçon.
Mes pleurs au fil de l’heure, entre Meurthe-et-Moselle,
Transforment la rigole en mare… Puis ruisseau…
Et mon cœur dans le bec du vieux moineau sans elle
Me nourrit de chagrin dans le lit du roseau.
Poème posté le 12/02/22
par Lamapola