Lui, la main dans ses cheveux,
Elle, le visage sur sa poitrine.
De son buisson, de loin,
Dans cette fin d’après-midi de janvier frileux,
Il observe deux amoureux enlacés,
Sur le banc vert de ses nuits blanches.
Malgré le paravent de verdure,
Il devine parfaitement les mots
Qu’échangent, silencieux, leurs cœurs unis.
L’éclairage public brille
Depuis déjà longtemps. Il se fait tard.
Le couple se lève d’un égal élan,
Sans cesser de s’étreindre,
Sans croiser ce regard qu’éblouit
Des trésors de tendresse.
Il les suit longuement des yeux,
Jusqu’à l’imposante grille du parc
Qui grince un peu lorsqu’ils la referment.
Alors il tire du bosquet
Un vieux carton aplati, puis son cabas.
Franchissant une porte qu’invente sa déraison,
Il semble la refermer avec soin.
Il retrouve son lit de bois soumis aux quatre vents :
Ce banc public, nid d’amour du jeune couple
Qui venait sans le savoir de le lui chauffer.
Il y sera bien cette nuit encore
Jusqu’au petit matin.
A présent il s’allonge, s’enveloppant
De la couverture qui tenait dans son sac.
Il remonte les genoux car elle est un peu courte.
Ses paupières lourdes, mais sous le charme encore,
Font signe au vieux réverbère
Qui semblant comprendre, leur obéit et s’éteint.
Les douces images de la fin d’après-midi
Dansent devant ses yeux.
Il y trouve doucement le sommeil.
L’attendrissant film qu'il a suivi adoucit sa nuit,
Prenant peu à peu la forme d’un rêve…
D’un sourire dessiné aux lèvres,
Il y enlace avec bonheur la belle,
-Son vieux paletot en fait, roulé en boule-
Sans rien sentir sous son flanc des lattes de bois
Ni de l’aquilon venu geler le square :
Songeant aux cuisses de cette femme,
Il dort, dans une chaleur sans pareille.