Du fond des champs arrosés des pas
De tous ces innombrables passants
Ayant au creux de leurs poings saignants
Partout porté ta voix
Je t’honore, ô liberté.
Par toi le vent lève sa voile qui parfois
S’enroule autour de nos bras
Et réarrange la lumière sous notre peau.
Longtemps je vois ces fruits rouges et sucrés
Dans les arbres au feuillage d’effroi gelé.
Mais traversant nos bouches lumineuses
Ta neige devient à mesure plus légère.
Ainsi, sans cesse, comme l’eau vive
Cherches-tu à fuir nos mains implorantes.
C’est là, à la grille du caniveau
Que ton éclosion arbore
Sa véritable splendeur.
Là où tu prends source
Ta pureté brulerait nos regards.
Tu es comme cet enfant parfois
Si indécemment roi
Qu’il en devient bête et méchant.
De l’autre côté de ta frontière
Il y a d’autres silhouettes humaines
Qui regardent celles d’ici.
A d’autres matins tu ressembles
A ces vols d’agrions dont les gros yeux
Reflètent toutes sortes de ciels bleus.
Un jour le vent décide duquel versant
De la montagne tu abondes le plus.
Pour un seul soupir de plaisir dans ton lit
Dans la nuit, milles désespérés appels.
Tes routes sont aussi mystérieuses
Que la brume au cou du lac en automne
Tirant son silencieux collier d’oiseaux d’eau.
Si l’on suit cette liane remontant
Ton visage comme un serpent
L’on ignore souvent où mène
L’extrémité de ta lumière.