Faut-il entendre la clameur,
Maintenant que raison triomphe sur les chaînes
Assurant un destin exempt de toutes haines,
Faut-il entendre les chansons de ce charmeur,
Qui de l'événement nous semble le jouet,
Dont l'esprit enjoué,
Toujours certain de dominer les choses,
En tous temps, en tous lieux,
N'énonce à venir que lentes nécroses,
Par bouche d'un enfant qui naquit vieux.
Y sommes-nous contraints
Depuis que nous avons de la paix l'habitude,
Qu'oubliés nous avons les mœurs de la vie rude
Et qu'aux nécessités, ne sommes plus restreints ?
Croyons-nous préserver la routine tranquille,
Enfermés dans nos villes,
Uniquement capables d'obéir,
En plein air, en clos lieux,
Tels des valets destinés à servir
Ces nouveaux nés qui naquirent trop vieux ?
A trop nous laisser faire,
A trop considérer que c'est bien pire ailleurs,
Que la docilité génère le meilleur,
Et que l'esprit critique est source de l'enfer,
Que bienveillance règne, ainsi que la sagesse
Connue pour sa largesse,
A rester confiant comme un dévot
Qui voit dieu en tous lieux,
Qu'un prêtre un jour déclara être veau,
Sûr qu'on s'ennuiera longtemps, et très vieux.
L'esclave ne doit pas
Briser sa chaîne ; il est écrit c'est interdit !
Il est nourri, il a des jeux, quel air lui dit
Que nul n'assume son bonheur jusqu'au trépas ?
Dans sa cabane il peut à loisir s'abrutir !
Nul besoin de sortir !
Le plaisir est servi sur un plateau
Qui pénètre en tous lieux
Et transforme son clapier en château,
Toujours jeune, toujours jeune ! Et très vieux.
Je partirai avant
Que n'advienne ce règne où la perfection
N'impose à tous sa délectation ;
Je partirai avec un grand rire devant,
Un grand pied, un grand nez, un très grand pied-de-nez !
Car aux âmes bien nées
Il n'est besoin de monter sur un trône.
L'infini en tous lieux
Se rit et se joue du regard des drones :
Qui ne craint la vie ne craint d'être vieux.