Année 1400 quand Pacha rêve… d’un sonnet
par Attention
Au fond
Dans le Palais de l’ombre sur les sommets rauques des minarets
L’éclair, tempête d’été, allume, leurs pieds alignés, les chaînes
Les gardes suprêmes, les douze parfaits !
Ce soir, le Sultan se donnera… à la Lune
Il lui offrira son âme,
Pure, parfaite dans… un sonnet !
Il choisira une belle Idée parmi ses soixante-dix Idées
Qui l’attendent, fées sublimes,
Dans ses harems,
Belles, timides, presque vierges, et…
De voiles roses, dés habillées
Car le plus grand Chef du Monde,
Le Conquéreur, le Tout Parfait
Veut être- le Plus Grand Poète
Celui dont l’Univers s’apprête
A lui offrir, offrande, ce soir,
Son sublimissime, plus beau sonnet…
Sa plus belle quête !
Sur les minarets, les gardes, sont sur leurs gardes…
Car colère,
Quand le Sultan s’énerve, de sa resplendissante hauteur,
Chaque soir !
Il fait de leurs vies une misère
Bien étalée sur le trottoir…
Ils prient la Lune, ils prient la Transe
Ils prient même l’Univers Immense
Ils prieraient même en grand secret
Le Dieu des ces impurs athées
Les douze apôtres millénaires
Ils sont priés
A même leur chaire
Par les douze coups du grand fouet !
Et tous ces rythmes byzantins
Que dansent leurs nombrils, en tambourin
Ils sont priés, ils sont priés… !
Dans les prison où les vaincus
Gémissent leur peine à genoux
Le bourreau s’apprête
En douze coups …
Trancher les têtes
II
Jusqu'à ce que le Plus Grand ait décidé :
- Silence !
Qu’il n’écrira pas de sonnet (vaine quête !)
Ce soir, Pacha est libre
Max – il danse
Il fait la fête…
Ce soir sa tête vagabonde
Une brune, une rousse ou une blonde ?
Il n’a pas fait encor son choix
Il regarde, ses amis, Poètes
Avec leurs muses classiques, parfaites
(Vêtues de longues robes noires de soie
Dansant le menuet, coquettes…)
Et dans sa barbe il prie, il prie
Le Ciel, d’un sublime « Inch Alla’ » !
La main rêveuse, à la bouche
Amène une datte
Bien farouche… la coupe est pleine
(D’une couleur louche…)
Et tout à coup !... Ô, ohh et Ah,…
…………………………………………………….
Le Pacha rêve… qu’il n’est qu’un Rêve…
Et peu importe, les douze pieds, le rythme,
Et sa grandeur vaine, « fierissime »
De tout ce qu’il croit ici qu’il a…
Son cœur voyage jusqu’au Ciel
Il est le Rêve… de l’Eternel !
Il est le rêve d’un petit gars
Et Pacha pleure, car son âme peine
A écrire une strophe, Ô, vilaine
Qui aurait fini dans ses quatrains…
En douze parfaites syllabes rares
Que même les plus jaloux des sbires
Auraient appris par cœur, enfin !
Comme ses martyres…
Car Pacha, Lui, il veut écrire
En vieux français le plus grand sonnet… !
Qu’il n’a jamais, o, jamais, existé
Auparavant
En douze par douze pieds et rimes
De celles où tout bon cœur s’arrime
Restant, épris, émerveillé
A même le vent
Alors viendraient tous le voir
Hugo, Baudelaire et même… Renoir !
Tous ces grands sublimes classiques
Qu’on oublia, là, ironique
Dans tout ce poussiéreux grimoires…
Tragicomédie (phonique…)
Car Pacha lui il a l’Idée :
- Il va l’écrire à la Télé !
Sera l’ poème le plus beau
Qu’elle diffusera partout chaque soir
En vers subtils, subliminaux
A l’heure réflexe du grand journal…
Même, Khayam Omar, son frère
Ne sachant plus comment y faire
Ecrire, aussi bizarre et beau… !
Viendra à Lui, chercher cette eau
De Vie… Vivante, qu’on espère
Inspirante
Chaque mot illuminant le Ciel
D’une couleur, LED, brillante, sublime
Et à la fin de chaque rime
Il y aura l’ sourire… de l’Eternel !
III
En douze parfaites syllabes rares, lui manque
Trois, alors sépare ses vers ici…et flanque
Le là ! Alors, soudain, Merveille du monde,
Son âme s’éveille, vagabonde… ici et là, l'étoile féconde
Que la Lune attache elle-même,
Plume légère, à son bras !
Et amène,
Le Rara Avis – l'Oiseau rare
Sous ses ailes, douce peine, une larme
Effleure le visage triste de l’âme
Fière et éprise de toutes les drames
Du monde des hommes d’ici bas…
Et éveille,
Les Mondes subtils des milles merveilles
Bien envoûtés... resplendissants
Indescriptibles, comme la Joie !
Ce Ciel Unique
Dont la flamme, oriflamme
Bien subtile, et fragile et légère,
Lorsqu’Elle traverse l’atmosphère
Invisible comme une sphère de vingt gramme
Et s’en va… S’en va… cette Âme…
S’exclame,
Philosophe, dans son rêve
Le Sultan - Le Grand Pacha !
Pour s’écrire
Dans ces espaces,
Comme ici, poème fugace
Où elle trace, d’une belle grâce,
Tout ce qu’elle veut !...Et tout ce qu’elle croit !
Libre…Nue… Sur substantielle
Joyeuse Âme qui se lève,
Rime légère d’une fumée, étincelle d’autre fois…
IV
Ô, et Ô et Ô et, Ô !
Restera à jamais oublié
Dans le couloirs du temps, fermé
Le merveilleux sublime sonnet…
Dont Pacha, un jour, a rêvé,
Inachevé… et drôlement beau
Triste Tristesse éternelle
Le sonnet tombé à l’eau !
Dring…Dring… le vieux réveil sonne
Encore une journée monotone
Encore le monde concret arrive,
De sa grammaire d’impératives
D’années en années volant
Temps qui passe, 2020…
Un autre corps, le grand supplice,
Comme chaque matin à l’heure propice
Cours ce Pacha, hélas factice…
Ce Sultan – Pacha mal rasé
Un peu beau et beaucoup moche,
Il embauche
Et quelle tristesse, triste tristesse éternelle
Sultan Pacha… doit bosser :)
Au fond
Dans le Palais de l’ombre où sommeillent
Les rauques sommets des minarets
L’éclair s’éloigne, et accompagne, ces intouchables impassibles :
Les gardes suprêmes, les douze parfaits !
C’était en 1400 me semble,
Pacha parla en dithyrambes
Cauchemar bizarre et désuet
Qu’il eut écrit là, dans le marbre
A la pointe brave de son sabre
Son rêve d’une nuit, inexplicable
Son rêve fantasque le plus secret…
Jacques AADLOV-DEVERS
Poème posté le 19/09/20
par Attention