Pénibilité
par Salus
Toutes nos maisons sont construites
Avec le sang des ouvriers ;
Tant de vieux maçons châtiés
Ont, de travail, leurs âmes cuites.
Initiée à ces douleurs
Et du mauvais vin qu’il faut boire,
Sur les chantiers, pour faire accroire
Au prolétaire être des leurs,
La vie, à mordre la poussière,
Suffit à peine qu’on soit fin
Pour terminer un plâtre enfin
Ou tracer d’un escalier l’aire …
Tout est technique et minutieux,
Qui paraît brutal et foutraque,
L’angoisse, au coffrage qui craque,
Le dosage, unique et précieux !
… Mais on nous voit en sombres brutes ;
Pour le public, on est des bras,
Et quand la bière nous fait gras,
L‘on oublie, ami, que tu luttes
Contre le poids et le mépris
Des matériaux et de la foule ;
Que de ce travail, seul découle
La souffrance ! et son maigre prix.
Au chaud des murs et sur le marbre
De vos belles habitations,
Pensez à nous, qui les faisions,
A nos mains, que le soleil sabre,
Au savoir vrai que cache un plomb ;
Au courage de la fatigue,
Quand l’épuisement rompt sa digue,
Que chaque os a l’air d’être oblong !
Maçon maudit comme un poète
Tu mourras bien avant ton tour
Les reins brisés par ton séjour
Aux gravats - mort comme une bête -
Poème posté le 14/07/21
par Salus