Je me laisse porter par ma grande paresse
Je vais au fil de l'eau bercé par le courant
Je ne crois plus depuis longtemps à la promesse
Tant du soleil levant que de Phoebus mourant
Surtout que tout cela dépend du choix horaire
La coupe est pleine et j'ai couru toutes les cartes
Et je n'invite plus l'imbécile à se taire
Ne trouvant plus de joie à donner quelques tartes
Si vous avez des convictions restez dedans
Nous jugeons les humains à leur caricature
Oubliant des espoirs la grand' déconfiture
Moi Je n'explique plus ce qui m'est évident
Je me laisse pousser par les grands vents marins
Prenant soin d'observer la courbe des nuages
Qui m'en disent plus long que les humains messages
Et le flair des oiseaux qui préviennent du grain
Je ne suis pas toujours l'avis des marsouins
Leur commune sagesse est souvent de légende
Surtout quand ils crient fort afin qu'on les entende
Ce sont des naufrageurs de fieffés sagouins
Je me méfie aussi des pêcheurs racontant
Qu'ils ont vu celui-ci qui a vu la baleine
Bien que ce ne soit que du vent ils sont contents
D'embobiner le mousse à en perdre l'haleine
Leur mémoire infinie contre quelques sequins
Vous convaincra que dans les mers les plus girondes
S'ébattent des naïades à dents de requins
Entraînant matelots en succulente ronde
Le squale est plus gourmand dans les eaux du voisin
Qu'il ne l'est dans la nôtre où ne le vit personne
Entendons-nous sonner quelquefois le tocsin
C'est juste pour tester que son timbre résonne
Viens dans mon eau petit Viens dans mon aquarium
Tu te régaleras de vaines friandises
Et tes yeux brûleront comme un feu de radium
Quand tu seras hameçonné par gourmandise
Tandis que d'où tu viens là-bas c'est chaque fois
Cet asticot chétif qu'au repas tu dévores
Pourtant nous sommes faits dit-on du même bois
Ici vois-tu notre néant on le décore
J'écoute l'armateur déclarer sûr de lui
Que jamais de son port ne sortira navire
Qu’éraflerait moindre glaçon ou même pire
...
Et que sur son radeau l'ultime phare a lui.