Mémoire d'une otarie
par Domagoj sirotinja
Bonjour, je m'appelle Droïdan.
Nous allons voyager ensemble
dans l'univers de ma mémoire,
à travers des souvenirs éparpillés,
le long du tunnel de l'histoire.
Je suis né le jour de l'annexion de la péninsule
de Crimée, quelle ironie, en l'an de grâce 2014
sur l'île de Rousskyi, mère de toutes les Russie,
en compagnie de mes frères cétacés,
sur la banquise espiègle
j'ai mis le nez et l'âme et les moustaches
dans le bourbier des évènements,
je ne pouvais être qu'un témoin évident.
Et l'on pénètre dans un tableau
vierge de suspicion, fuck abstraction !
L'image peut paraître exubérante,
mais la volonté de dire au-delà
de l'impression primesautière
on peut, par le pouvoir de l'expression sincère,
saluer l'artiste au chapeau.
Ancienne résidence impériale reconstruite au XIXème siècle,
palais aux mille secrets, forteresse des puissants,
il est au café ce que la cerise est au gâteau,
cultivé dans le croissant fertile, prêt à défiler,
il est la crème, il est le lin, légendaire
maître des lieux, l'homme torse nu,
murmurant à l'oreille des chevaux,
ceinture noire de taekwondo,
peintre au pochoir hantant les ruines d: Ukraine.
On voit d'abord un enfant de Borodyanka
balancer Vladimir sur le dos
par une subtile prise de judo.
Pas de temps mort face au visage de la guerre,
un Z apparaît sur un engin russe,
transporteur de bien des galères.
On continue de voyager à Irpin,
on rit, on pleure,
les bras d'une danseuse nous accueille
dans un ballet à ciel ouvert.
Une pirouette nous ramène à la réalité
d'un immeuble passablement détruit,
noirci à la bombe, gris comme le temps
ivre de gloire posthume.
Est-il encore possible d'éteindre l'incendie ? demande cette dame en empoignant un extincteur, est-il possible de croire à la vie lorsque la mort rôde tel un corbeau grand bec ouvert ?
C'est le jeu de la balançoire,
l'équilibre est fragile,
c'est la baignoire nue
sans eau ni électricité.
La pyramide de Maslow n'est plus
qu'un lointain souvenir
et dans l'urgence de baumer le teint
on se remémore ses cinq étages.
Les pensées fleurissent comme des leurres,
le besoin de survivre reste prioritaire,
avoir envie de voir un lit,
d'appeler un arbre, de serrer une main,
d'une bonne et tendre bise,
de frissonner, de séduire.
On se rappelle le visage sain de sa grand mère,
sur une charrette à travers champs,
de la neige recouvrant les coupoles de Kiev,
du pas léger de grand papa en forêt,
tout cela paraît dans l'apparence d'un rêve.
C'était une belle bête, c'était un amour,plongé dans les profondeurs d'un delphinarium, à primorsky oceanarium, lieu de frotti-frotta. C'était un marin navigant de port en port, de territoire en terre aléatoire, la mâchoire conquérante du Bosphore. C'était les grands moments des dernières notes, orphelins par nature, méritant le détour, l'exil de l'otarie de steller sur une mer de beauté.
1. Des hommes et des âmes
2. La vie trépidante
3. Mémoire d'une otarie
4. Big Bang
Poème posté le 20/05/23
par Domagoj sirotinja