on nous rend hargneux
on nous rend méchants
on nous rend bêtes
on nous rend ce que nous ne sommes pas
ce que nous n’avons jamais été
ce que nous ne serons jamais vraiment
on nous rend moqueurs
bouffeurs
râleurs
toujours vociférant
toujours peureux de tout
peureux des autres
peureux de soi
peureux de tout ce qui bouge
tout ce qui respire
de tout ce qui avance
de tout ce qui est autour de soi
de tout ce qui est autre que soi
de tout ce qui ne baisse pas les yeux
de tout ce qui n’est pas aligné
ce qui n’est pas rangé
de tout ce qui n’est pas obéissant
applaudissant
bêlant
rampant
on nous rend vengeurs
accusateurs
montreurs du doigt
on nous rend accrocs au discours
bigots du discours
zélateurs du discours
on nous rend étrangers à notre monde
étrangers à nos doutes
étrangers à notre vraie nature
étrangers à notre nous-même
notre tendre nous-même
notre sensible nous-même
on nous rend malheureux
oh ! si malheureux !
francis avril