Au poète
par Alexandre POUCHKINE
Poète, n'attends rien des faveurs du vulgaire.
L'extase et l'ovation bruyante n'ont qu'un temps ;
qu'un sot juge ton œuvre ou que le peuple en rie,
toi, demeure serein, taciturne et constant.
Tu es roi : vit donc seul. Par de libres chemins
va seul où te conduit librement ton esprit,
prenant soin de polir le fruit de tes pensées,
sans fixer de salaire à la belle prouesse.
Ton salaire est en toi. Tu es juge suprême,
plus sévère qu'un autre à censurer ton œuvre.
En es-tu satisfait, scrupuleux artisan ?
Satisfait ? ̶ Laisse alors la plèbe t'insulter
et cracher sur l'autel où crépite ta flamme
ou, par enfantillage, ébranler ton trépied.
7-VII-1830
Alexandre Pouchkine Ce poème a été vérifié et le contenu authentifié.
Poésies
nrf Poésie/Gallimard
Poème posté le 31/03/18
par Saintes