Diagnostic
par Jean RICHEPIN
Le front est balafré de plis. Les yeux ardents
Flambent de fièvre et sont noyés de pleurs. La bouche
Fait un trou noir, béant, plein de bave et farouche
Où la langue ballotte, où se collent les dents.
Le ventre convulsé s’enfle, rentre en dedans,
Puis ressort, bossué de nœuds, comme une souche,
Et les poumons, crachant le spasme qui les bouche,
S’essoufflent par la gorge en cris durs et stridents.
Mais quel est donc ce mal, ce coup d’épilepsie,
Où l’on râle écumant, la cervelle épaissie,
Les sens perdus, les nerfs détraqués, où la chair
Semble un poisson vivant dans une poêle à frire ?
Hélas, ce mal, c’est notre ami, c’est le plus cher,
C’est le consolateur des hommes, c’est le Rire.
Les Blasphèmes – 1884
Poème posté le 11/03/23
par Oxalys