Sonnet pour Hélène LXIII
par Pierre DE RONSARD
par Rickways
Je faisais ces Sonnets en l'antre Piéride (1),
Quand on vit les Français sous les armes suer,
Quand on vit tout le peuple en fureur se ruer,
Quand Bellone (2) sanglante allait devant pour guide,
Quand au lieu de la Loi le vice, l'homicide,
L'impudence, le meurtre et se savoir muer
En Glauque et en Protée (3), et l’État remuer,
Étaient titres d'honneur, nouvelle Thébaïde (4),
Pour tromper les soucis d'un temps si vicieux,
J'écrivais en ces vers ma complainte inutile.
Mars aussi bien qu'Amour des larmes est joyeux.
L'autre guerre est cruelle, et la mienne est gentille.
La mienne finirait par un combat de deux,
Et l'autre ne pourrait par un camp de cent mille.
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(1) l'antre des Piérides, soit des Muses
(2) Déesse de la guerre
(3) Symboles de la métamorphose : Glauque, pêcheur transformé en dieu marin ; Protée change de forme à sa guise
(4) Conflit mortel entre les fils d'Œdipe, pour la gouvernance de Thèbes.
Les Amours - NRF / Poésie / Gallimard
(1964)
Poème posté le 28/03/23
par Jim